Chevalier d'Eon (Le)
Charles-Geneviève-Louis-Auguste-André-Thimothée d’Eon de Beaumont - dit le Chevalier d’Eon (1728-1810) - le personnage éponyme de ce roman de l’écrivain japonais Tow Ubukata, s’est illustré sous le règne de Louis XV en jouant à de nombreuses reprises le rôle d’espion pour le compte du Roi de France. Il a ainsi effectué, entre autres choses, des reconnaissances sur les côtes britanniques en vue d’une invasion. Mais c’est peut-être avant tout pour son habillement, qui le faisait passer pour une femme, qu’il est resté dans les mémoires – ce n’est que lors de son autopsie que les médecins purent enfin s’assurer qu’il était bel et bien de sexe masculin !
Cet individu hors du commun a retenu l’attention d’Ubukata, qui en a tiré une épopée historique, mâtinée de fantastique, déclinée sous trois formats : un roman, un manga et un « anime » en 24 épisodes, réalisé par son compatriote Kazuhiro Furuhashi en 2006.
Le roman s’ouvre sur la promesse faite par le jeune d’Eon et sa sœur Lia, encore enfants, sur le point d’être séparés, de se retrouver une fois adultes. Ils s’offrent des anneaux sensés les rappeler l’un à l’autre, anneaux qu’ils échangeront des nouveau le jour de leurs retrouvailles.
Sept ans plus tard, d’Eon, devenu policier, s’apprête enfin à revoir sa sœur aînée au château de Versailles, à la cour royale. Mais les mois précédents ont vu plusieurs voitures transportant des dames sauvagement attaquées, leurs occupantes enlevées sans laisser de traces. Et c’est au tour de Lia de se faire kidnapper. Sur son véhicule s’étale le mot « PALMS », tracé en lettres de sang, premier indice dans l’enquête qui mènera d’Eon sur les traces de sa sœur adorée. Son oncle, le préfet de police Michelet Ledolf, l’écarte rapidement de l’enquête. Il s’avère en effet qu’il est de mèche avec un certain « Notre-Père », cerveau d’une vaste machination qui ne vise rien de moins qu’à s’en prendre aux fondements du royaume de France.
Eon se voit bientôt secrètement recruté par Louis XV, qui lui adjoint Robin pour lui prêter main forte, un enfants aux cheveux blonds et aux yeux verts doté de qualités multiples. Tous deux suivent la piste du mystérieux « Notre-Père » jusqu’à l’ambassade de France à Naples. Ils apprennent de Charles VII, roi d’Espagne et de Naples, que l’individu qu’ils traquent fréquente les cercles d’artistes, avant d’échapper de peu à un complot ourdi par l’ambassadeur de France, proche de ce dernier.
Les investigations des deux agents secrets vont les mener jusqu’à Rome. La Curie elle-même semble infiltrée et c’est au Vatican que vont se conclure ces aventures, qui gravitent autour d’une mystérieuse Sainte Epée…
Le récit d’Ubukata est ponctué d’éléments qui relèvent clairement du genre fantastique. Ainsi, un lien surnaturel semble relier Eon à Lia, qui parvient à guider son frère tout au long de ses recherches à l’aide de « poèmes » cryptés qu’il doit s’échiner à déchiffrer afin d’avancer plus avant. Les adeptes de « Notre-Père » possèdent tous, quant à eux, la capacité de se métamorphoser en gargouilles terrifiantes quand vient pour eux le moment de jeter bas leurs masques de respectabilité.
L’intrigue est menée tambour battant, d’un bout à l’autre du roman. On peut cependant regretter que « Le Chevalier d’Eon » ne prenne pas plus le temps de nous dépeindre et les personnages qui le peuplent, et les lieux qu’il parcourt. Car du coup, le résultat, s’il est efficace, n’en est pas moins un rien désincarné. Ceci est regrettable car il y avait là matière à tisser un tableau bien plus riche que celui qui nous est présenté au final, les péripéties entourant le Chevalier D’Eon étant propices aux développements aventureux.
S’il peut se lire indépendamment, on peut dès lors supposer que cet ouvrage retiendra surtout l’intérêt des « aficionados » du manga et de l’anime du même nom.
Tow Ubukata, Le Chevalier D’Eon, traduit du japonais par Eric Faure, Rodolphe Massé et Alexandra Maillard, 185 p., Calmann-Lévy