Tout ce que je ne t'ai pas dit

Bonjour, tout le monde ! J’espère que vous allez bien.

Résumé :

Après avoir perdu sa meilleure amie, Piper Rhodes décide de changer de lycée, déterminée à ce que sa dernière année soit différente. Elle rencontre bientôt West, le joueur star de l'équipe de foot, le garçon dont tout le monde parle. Malgré la peur de Piper de perdre à nouveau un être cher et malgré tout ce qui les sépare, Piper se lie à West, sans que jamais elle ne réussisse à lui dire un seul mot... Une histoire de confiance, d'amitié et d'amour, où se révèle le pouvoir des mots qu'on dit, et de ceux qu'on ne dit pas.

Je vous parle maintenant de la sortie du jour : Tout ce que je ne t’ai pas dit aux éditions Fleurus. Je remercie d’ailleurs vivement ces éditions de m’avoir confié ces épreuves non-corrigées qui m’ont fait passer un moment de lecture des plus agréables.

Lorsque j’ai refermé le roman, la perplexité me brouillait encore un peu la vue. J’ai vraiment démontré pour ce livre un certain enthousiasme, tout en me demandant pourquoi ce tel engouement pour un récit qui, à première vue, est parsemé d’un amour prévisible et d’une histoire un peu cliché. Pourtant, à travers les mots sont apparus des sentiments réels et des émotions vives pour le lecteur. Les personnages m’ont vraiment captivée, malgré ces comportements prévisibles, même si parfois dans l’excès ; ainsi, en leur compagnie, les lignes passaient si vite qu’il ne m’a pas fallu plus d’une journée pour gober l’écrit.

Tout ce que je ne t’ai pas dit est d’abord intriguant par son titre qui peut avoir maintes interprétations… En réalité, le roman traite d’un sujet peu abordé en règle générale : le mutisme sélectif. D’abord, qu’est-ce ? Ce trouble, trouvant origine dans une anxiété anormalement élevée, empêche la personne qui en est atteinte de parler, à l’exception des personnes qui lui sont très proches et en qui elle a confiance.

Piper souffre de ce mutisme sélectif depuis bien des années. Le cercle de personnes qui entendent sa voix est restreint et, lorsque sa meilleure amie et elle sont séparées suite à une dispute, Piper décide de changer de lycée. Elle arrive donc dans un environnement nouveau, fait de protagonistes inconscients de son trouble. Notre personnage principal nous explique donc, à travers les actions des autres élèves et de son entourage, à quel point il peut être difficile pour quelqu’un atteint de mutisme sélectif de faire comprendre à chacun la complexité de la situation. Dans l’esprit communautaire, ce trouble est vu comme facilement remédiable, comme si l’indisposé s’empêchait de piper mot.

Avoir, à travers la narration de Piper, le point de vue d’un malade que la société ne comprend pas nous ouvre les yeux sur la souffrance que certaines phrases paraissant anodines peuvent provoquer sur la personne atteinte.

Les questions telles que : « Pourquoi tu ne parles pas ? », « Tu parles avec ta famille, pourquoi pas avec moi ? », « Tu dois être forte, Piper, tu vas mieux maintenant ! », « Parle, espèce de débile ! » ou même… « Comment tu t’appelles ? » peuvent avoir un impact considérable. Imaginez-vous, bloqué par vos émotions et devoir, chaque jour, entendre les mêmes mots sans jamais pouvoir vous faire traduire. Avoir envie d’encastrer ces gens qui prétendent vous comprendre, mais qui pourtant semblent guider leurs actions dans le seul but de vous faire parler, parce qu’ils pensent que vous en êtes capable. Mais, ce n’est pas si aisé et l’auteure expose les émotions de Piper de manière à bien nous le faire assimiler !

Pourtant, au côté de cette colère dirigée vers soi et vers les autres se trouve également une énorme souffrance… La relation qu’elle entretient avec West en est le parfait exemple.

Piper rencontre West dès son premier jour. West est ce qu’elle qualifie de « Royal », c’est-à-dire un membre éminemment populaire au lycée. D’abord méfiante envers ce jeune homme faisant ressurgir de mauvais souvenirs de son passé, ils tissent au fur et à mesure des pages un lien unique. Le silence gêné de Piper ne l’a pas fait fuir, il ne s’est pas montré incommodant. West est le personnage qui incarne des valeurs fortes comme celles de l’acceptation de la différence, de l’entraide ou encore de l’amitié. Les liens qui se forment entre nos deux protagonistes se font pas à pas, par des petits mots puis des rendez-vous. Leur relation est très douce, dénuée d’intérêt et très attachante.

J’aimerais aussi parler de Tanvi et de la famille de Piper, des protagonistes secondaires qui m’ont beaucoup touchée. Tanvi est une amie que la jeune fille rencontre dans son nouveau lycée, ce genre d’amie qui ne vous pose pas de questions mais se montre présente lorsque vous en avez besoin. Cette relation entre elles m’a rappelé ma propre relation avec mes meilleures amies, et cela m’a fait chaud au cœur. La famille de Piper, quant à elle, est à la fois drôle, conciliante mais aussi profondément humaine. Partager, à travers les lignes de l’écrit, un repas de famille pouvait parfois paraître tellement vrai que le lecteur pourrait presque s’imaginer y être assis et sourire aux petites disputes entre frères et sœurs !

Tout ça pour vous expliquer tous les points positifs que j’ai tirés du roman. Mais, même s’ils sont nombreux, je ne peux sauter l’énorme défaut qui m’a parfois un peu freinée : le prévisible, les clichés ! Je vous ai parlé des relations, des personnages secondaires, qui m’ont parfaitement charmée. Mais avez-vous remarqué que je n’en ai parlé que comme des personnes dont même les défauts sont attachants ? Parce qu’aucun d’entre eux n'est assez approfondi dans son côté obscur, laissant même croire au lecteur que celui-ci est inexistant. C’est réellement dommage, car même si l’écrit a pour but d’être doux et moralisateur, un peu de piment au niveau des comportements apporte toujours un peu plus de vraisemblance au texte !

J’ai retrouvé ce même défaut du point de vue de l’intrigue. Que ce soit au niveau du passé des personnages, des actions futures ou même des questions en suspens, tout était devinable. J’ai levé par plusieurs fois les yeux au ciel à une révélation qui se voulait surprenante. Pas de surprise, malheureusement !

Même s’il ne faut pas attendre de ce roman une aventure aux mille rebondissements ou même une psychologie mêlant lumière et obscurité, ces défauts ne m’ont pas empêchée d’apprécier réellement l’écrit… Je pense cependant qu’il est en effet bien plus conseillé de le lire lorsqu’on est à l'âge de l’adolescence, qu’on rêve de douceur, d’amour et de liberté.

En résumé, même si Tout ce que je ne t’ai pas dit n’offre pas de surprises, il n’en est cependant pas moins très intéressant et c’est une découverte des plus éloquentes sur le mutisme sélectif et le regard que la société porte sur celui-ci. Parcourir le tout à travers des personnages attachants et une écriture fluide rend la lecture agréable, malgré les quelques clichés.

Tout ce que je ne t'ai pas dit, par Kylie Fornasier, éditions Fleurus, février 2018, 304 pages, 9782215135678, 16,90€