Testaments (Les)
30 ans après le premier volume et alors que la série éponyme est toujours en production, voici la suite de La servante écarlate.
Soyons claire de suite : lire ce volume sans avoir ni lu le livre ni vu la série, cela ne permet pas de saisir tous les enjeux et les subtilités.
Quinze ans après les événements de La servante écarlate, le régime théocratique de la République de Galaad a toujours la mainmise sur le pouvoir, mais des signes ne trompent pas : il est en train de pourrir de l'intérieur.
À cet instant crucial, les vies de trois femmes radicalement différentes convergent, avec des conséquences potentiellement explosives. Deux d'entre elles ont grandi de part et d'autre de la frontière : l'une à Galaad, comme la fille privilégiée d'un Commandant de haut rang, et l'autre au Canada, où elle participe à des manifestations contre Galaad tout en suivant sur le petit écran les horreurs dont le régime se rend coupable. Aux voix de ces deux jeunes femmes appartenant à la première génération à avoir grandi sous cet ordre nouveau se mêle une troisième, celle d'un des bourreaux du régime, dont le pouvoir repose sur les secrets qu'elle a recueillis sans scrupules pour un usage impitoyable. Et ce sont ces secrets depuis longtemps enfouis qui vont réunir ces trois femmes, forçant chacune à s'accepter et à accepter de défendre ses convictions profondes.
Mais quelle suite ! On ne pouvait rêver plus passionnant que de suivre ces trois femmes. Bon, la 4e de couverture ne dit pas grand-chose mais il ne faut pas lire beaucoup de pages pour comprendre qui est qui. Aussi ce n’est pas un secret : on suit Jemina Agnès, 13 ans, à Galaad/Gilead, qui refuse d’épouser un Commandant de plus de 50 ans et se révèle être la fille aînée de June/Defred. Au Canada, on suit celle qui apprend qu’elle est la symbolique Bébé Nicole, fille de June mise en sécurité via un réseau clandestin loin de Galaad. Et la troisième femme surprenante, c’est tante Lydia, la détestée.
(J’ai découvert la série, je n’ai pas eu le temps de lire le livre avant la sortie des Testaments) Tante Lydia dévoile des facettes totalement inattendues et qui montrent une femme qui cherche à survivre et à cacher sa révolte contre le nouvel ordre. Jemina Agnès est plus le symbole critique des dérives d’une société pédophile, violente (avec le viol mensuel des servantes et le traitement en général de la femme) et abusive. Elle se rebelle jusqu’à préférer entrer dans l’école des Tantes plutôt que de d’être un pantin d’Epouse. Bébé Nicole doit se montrer très forte pour aider à faire tomber Galaad/Gilead.
La traductrice a préféré changer quelques termes, c’est pourquoi j’ai utilisé Galaad/Gilead. Mais ce livre reste très fort et très réussi. Il fait même un peu flipper, en cette fin de confinement COVID19, où on lit que les banques poussent à supprimer l’argent liquide, nous rappelant que la première mesure visible contre les femmes dans le premier tome, c’est la confiscation de leur compte en banque – dans une société où l’argent liquide a presque disparu !
Margaret Atwood a réussi une suite qui nous éclaire et nous offre l’espoir, contrairement à la noirceur de son premier roman. De plus la série télé peut continuer, sans être en contradiction avec un tome 2 qui aurait été trop chronologiquement dans la foulée de La servante écarlate.
Pour toutes celles et tous ceux que le premier livre ou que la série a séduits.
Les testaments par Margaret Atwood, traduit par Michèle Albaret-Maatsch, Robert Laffont