Serviteur des Enfers

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1480. Tenochtitlan (Mexico), capitale de l’empire aztèque. Acatl, grand prêtre des morts, s’entaille le lobe des oreilles pour fournir le « sang vif » nécessaire au service funéraire… La routine !Pendant ce temps, une liaison interdite est sur le point de se nouer entre Eleuia, prêtresse aussi ambitieuse qu’imprudente, et Neutemoc, guerrier jaguar issu de l’élite des combattants et frère du grand prêtre ; mais lorsque Eleuia disparaît, laissant derrière elle des traînées de sang et des traces magiques, Neutemoc est évidemment suspecté.

 

Écrire une fantasy fantastico-policière se déroulant chez les Aztèques, il fallait y penser et il fallait oser ! Aliette de Bodard l'a fait.

Avec un soin et une précision incroyables, elle recrée pour nous cette civilisation depuis longtemps disparue, qui aurait pu nous en apprendre beaucoup. Un monde où même ceux issus des plus basses couches de la société pouvaient s'élever au mérite, loin des castes figées de l'Occident à la même époque. C'est le cas d'Acatl et Neutemoc, enfants de paysans, qui ont su grimper les échelons. Grâce à une volonté sans faille et en s'illustrant sur les champs de bataille pour Neutemoc et avec un coup de pouce non désiré pour Acatl.

L'autrice reprend tous les rites et croyances des Aztèques, notamment autour de la symbolique du sang et imagine que toutes les légendes disaient vrai ; elle peuple son roman de créatures émergeant du plus profond du monde des ombres, justifiant ainsi d'une certaine façon les scarifications rituelles et les sacrifices - animaux comme humains - qui rythmaient les jours.

Loin d'un monde de "sauvages", comme la vision des premiers conquistadors l'a longtemps laissé croire, elle remet à sa juste place une société construite, éminemment politique, où l'éducation et le bien commun ont une place importante.

 

Malgré toutes ces qualités, et malgré une écriture soignée, le roman n'a pas su m'emporter comme je l'espérais.

La faute tout d'abord aux noms : à rallonge, imprononçables et assez proches les uns des autres, j'ai beaucoup peiné. Je devais à chaque fois arrêter ma lecture pour rechercher qui était ce dieu ou ce lieu (je n'ai découvert le lexique final qu'en arrivant à la fin du roman).

Ensuite, il y a beaucoup de redites (par exemple, la dégustation de chocolat avec de la vanille et des épices, qui revient très souvent, là où une seule fois aurait suffi pour camper les habitudes culinaires). La structure du roman est une répétition permanente des mêmes actions : Acatl va à un endroit, se bat contre une créature magique, est blessé ou déplore un mort, retourne chez son frère ou à son temple, mange, dort. Et ça recommence le lendemain. J'ai eu souvent la sensation de relire sans cesse les mêmes choses, ce qui enlève toute possibilité de rythme. J'ai fini par me désintéresser de l'intrigue.

Dommage, car la construction de l'univers est vraiment impeccable. Trop peut-être, au détriment de l'histoire et du rythme.

 

Serviteur des Enfers, d'Aliette de Bodard, Mnémos, ISBN 978-2382671108, 22,50 €

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