Science-fiction - Les frontières de la modernité

Réédition d'un ouvrage que j'avais salué lors de sa parution, car il manquait cruellement de pavé théorique sur le genre, depuis les livres des Sadoul, Barets, Bogdanoff ou Valéry. La couverture est différente mais, surtout, Gérard Klein agrémente le livre d'une intéressante préface. Il s'y interroge sur la passion des amateurs pour la définition de leur genre favori : « Je n'ai jamais rencontré nulle part une telle obsession, confinant au délire paranoïaque, de la définition. Personne à ma connaissance n'a jamais tenté de définir la poésie ou le théâtre, ni même le roman ». Il y voit trois raisons : « le souci de faire comprendre, celui de se défendre et enfin celui de se singulariser, de se définir soi-même ». Tout cela est très bien, mais, par la suite, Klein tombe un peu dans le travers qu'il dénonce.... Peu importe, le texte est brillant.

En ce qui concerne l'ouvrage lui-même, je ne peux que référer le lecteur à la chronique que j'avais rédigée en mai 2010, et aisément consultable dans nos archives. Après un préambule théorique, consacré aux champs thématiques abordés par la science-fiction, Ruaud et Colson divisent le livre en quatre parties, largement inégales. La première traite des précurseurs du genre, du XVIe au XVIIIe siècle. La deuxième, plus consistante, va de 1780 à 1914. C'est « le long XIXe siècle », de l'apparition du roman gothique anglais jusqu'à Jules Verne et H. G. Wells. Les auteurs soulignent bien l'importance capitale de la littérature d'anticipation française. Troisième partie relative à la SF la plus connue, soit l'âge d'or américain. Mais ils n'ont garde de négliger la naissance des revues françaises, la new-wave anglaise, ou l'émergence du Japon. Ici aussi est enfin abordé le cinéma. Bien plus courte, la quatrième et dernière partie développe la SF asiatique, par les mangas entre autres, mais aussi la civilisation numérique, les effets spéciaux, pour conclure par quelques réflexions à propos des frontières de la modernité, comme l'annonce le titre.

Très richement illustré (en noir et blanc), l'ouvrage, en outre fort bien écrit, s'affirme comme la nouvelle bible de l'amateur de science-fiction du XXIe siècle.

Indispensable.

André-François Ruaud & Raphaël Colson, Science-fiction - Les frontières de la modernité, Éditions Mnémos, 2014, 398 p., 22 euros.

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