50° au-dessous de zéro
Après les pluies diluviennes des « Quarante signes de la pluie », Kim Stanley Robinson poursuit sur sa lancée pour nous prévenir des lendemains qui nous attendent et qui déchantent.
Au programme cette fois, la froidure extrême.
La faute au Gulf Stream, ralenti dans sa remontée par le réchauffement des eaux de mer et surtout à la perte de salinité due à toute l’eau douce des banquises qui fondent.
Enfin, je vous résume en gros la situation.
Nous retrouvons, dans ce deuxième volet, les personnages auxquels nous nous sommes attachés mais nous suivons plus particulièrement l’action et la réflexion de l’un d’entre eux : Frank Vanderwal.
Après l’inondation de Washington (sans vouloir vous affoler, les évènements racontés se déroulent après-demain, on est juste en plein dans les présidentielles américaines), Frank ne trouve pas de logement qui lui convienne. Non seulement les loyers ont explosén ne permettant pas à un chercheur de s’offrir autre chose qu’une cave mais Frank a envie de vivre autre chose. De vivre autrement, plus en accord avec la nature.
Il décide donc d’installer une cabane au sommet d’un arbre dans le parc dans lequel se sont réfugiés les animaux du zoo de Washington. Un parc qui est squatté par les sans-abri de la ville.
Et les uns et les autres, malgré leurs différences, vont se rencontrer : de quoi avoir de sacrés quarts d’heure de philosophie.
Comme dans « Les quarante signes de la pluie », chaque chapitre est précédé d’une information sur le climat, sur l’évolution de l’humain face à l’adversité. Réflexion qui est illustrée par ce qui suit.
On approche la problématique des dérèglements climatiques par l’analyse d’un cas particulier. Comment survivre quand la température descend 50° au dessous de zéro ?
Comment poursuivre les recherches sur le climat, sur les solutions à apporter quand tout s’accélère à tel point que la situation paraît désespérée ?
Nous retrouvons les habitants du Khembalung qui deviennent après la montée des eaux, les réfugiés du Khembalung.
La famille Kibler et ses engagements politiques, très présente dans le premier volume, reste plus en arrière plan mais elle est bien là avec son propre soucis, leur étrange petit garçon.
C’est la démarche d’un individu qui est détaillé dans ce volume.
Bon, pour le plaisir de la lecture, il y a une histoire de complot, un enfant qui semble prédestiné… enfin tous les ingrédients pour avoir envie de lire ce qui est une catastrophe annoncée.
Tout est si bien documenté, argumenté, explicité que « ça fout la trouille ». Heureusement que les personnages ont l’énergie communicative pour nous éviter la déprime. N’empêche que j’ai commencé à m’acheter des polaires dans l’éventualité d’un refroidissement subit.
C’est vrai qu’en lisant ce livre tout en écoutant les informations sur la banquise qui font plus rapidement que prévu, sur les gaz qui se dégagent du permafrost, sur le manque de matières premières, les spéculations sur le pétrole, la pénurie du blé, enfin, tout est là pour confirmer que ça va déjà très mal pour la planète. On est déjà dans le livre.
Pour ce qui est du complot, on comprendra que certains aiment à jouer avec les enjeux financiers que tout cela représente.
Alors pour en savoir plus, lisez ce livre, cela vous évitera de vous laisser endormir par le ronron des médias.
Et j’attends impatiemment la suite.
J’aime cette science-fiction qui colle à la vie réelle.
Je trouve qu’on devrait "contraindre" gentiment, tous les candidats à des postes de responsabilités de lire ces livres de Kim Stanley Robinson. Comme quoi politique et science-fiction peuvent toujours se conjuguer avec talent. Que la science-fiction, c’est aussi un cri d’avertissement et pas toujours une fuite en avant.
Qu’on peut être adulte et responsable et lire de la science-fiction.
50° au-dessous de zéro de Kim Stanley Robinson, traduit par Dominique Haas, illustration de Didier Thimonier, Presses de la Cité, novembre 2007.