Village évanoui (Le)

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Comme nos lecteurs le savent, j’apprécie beaucoup Bernard Quiriny, depuis ses Contes carnivores, salués ici même, et Prix Rossel 2008. Si son roman Les assoiffées m’avait un peu déçu, j’avais été très enthousiasmé par le recueil Une collection très particulière, chef-d’œuvre de fantaisie joyeuse et goguenarde et, sans conteste, sa plus belle réussite à l’heure actuelle.

Voici un second roman, à l’intrigue passionnante, qui se lit d’une traite. L’idée de base n’est pas totalement originale, mais son traitement l’est. Sans raison aucune, un petit village du centre de la France, Châtillon-en-Bierre (« entre Auvergne et Morvan »), se voit tout à coup coupé du monde. A quelques kilomètres du village, tout s’arrête, les voitures tombent en panne, les communications sont interrompues. « C’est sûrement une blague », dit Besson. Mais ce n’était pas une blague. En effet, la même mésaventure arrive à tous ceux qui veulent quitter Châtillon-en Bierre. Un mur invisible les sépare du monde extérieur. De manière classique, mais habile, Quiriny tire toutes les conséquences tragi-comiques possibles de ce constat abrupt : plus moyen d’entrer ni de sortir. Si les villageois en rient au début, la situation se poursuivant, ils rient moins. Se posent les questions d’approvisionnement, par exemple. Les réactions du maire, de la police locale ou du curé, bien décrites, valent leur pesant d’or. Voilà un petit monde qui par la force des choses devra choisir l’autarcie. Comme dans Sa Majesté des mouches, mais entre adultes cette fois, une nouvelle société se construit. Et la tentation du populisme, puis du totalitarisme, se produit, avec l’intervention d’un paysan autoritaire, qui constitue une petite « république autonome » à l’intérieur même du village. La guerre civile menace...

Comme prévu, la fin sera ouverte, et je vous la laisse découvrir. Voici un petit roman excellemment écrit, dans une certaine tradition du roman de terroir français (Giono, Aymé ?), qui n’a pas bien sûr pas la prétention d’égaler Ravage de Barjavel, et qui fait réfléchir tout en s’amusant. N’est-ce pas le propre d’un bon bouquin ? Mais, finalement, je me demande si Quiriny n’est pas meilleur nouvelliste que romancier. Attendons.

Bernard Quiriny, Le village évanoui, Flammarion, 2014, 217 p., 17 €.

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