Nous rêvions juste de liberté
Dans un pays sans nom, Hugo, un jeune homme rebelle, en fait voir de toutes les couleurs à ses parents. Placé dans un institut privé, il y rencontre trois voyous qui deviendront ses frères de sang. Nous les regardons grandir, se découvrir une passion pour la moto et tout plaquer pour prendre la route. Ils roulent vers l’ouest, à la rechercher du frère de l’un d’entre eux.
Un mot sur l’auteur
Henri Lœvenbruck est un écrivain français, parolier et scénariste né en 1972, auteur de thrillers, de romans d’aventure et de fantasy. Son parcours éclectique l’a mené à la Sorbonne (lettres américaines et anglaises), à Amnesty International (comme maquettiste), en Angleterre (comme prof de français), au journalisme (il a cofondé Science-fiction magazine, avec son ami Alain Névant).
Son premier roman a été publié en 1998 aux défuntes éditions Baleine (qui pour l’histoire, publièrent aussi le premier roman de Caryl Férey… on peut dire qu’ils avaient du nez), avant de cartonner avec une trilogie de fantasy, La Moïra, qui s’est écoulée à plus de 300.000 exemplaires.
Il a été nommé chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres en juillet 2011.
Mon avis
Nous rêvions juste de liberté est un roman qui prend son titre au pied de la lettre. Il s’agit d’un road movie écrit à la première personne du singulier, et autant vous le dire d’emblée : le style ne plaira pas à tout le monde. Les adeptes de littérature classique vont grincer des dents, et c’est tant mieux. Le roman s’ouvre sur une confession magnifique, qui nous expose d’emblée comment le récit va se terminer (presque… je n’en dis pas plus) devant le juge. Comme si la recherche de la liberté était un crime, comme si le fait de vouloir s’affranchir des règles condamnait de facto à l’exclusion ou à la prison. L’auteur use d’un style narratif mené tambour battant, gaz à fond, dans un langage parlé, où certaines expressions récurrentes sont en fait les tics de langage (« ma parole ») d’Hugo. Car c’est bien Hugo qui nous parle, en direct, sans artifices et sans faux semblants. Avec ses mots, sa grammaire, sa naïveté et son honnêteté, il ne nous cache rien de ses angoisses, de sa colère, de ses états d’âme, de son sens de l’amitié. Il ne cherche pas non plus à nous mentir, à nous protéger, à nous faire croire qu’il n’aime pas boire plus que de raison, prendre de la drogue ou se battre. Dans la droite lignée d’un Kerouac, il prend la route en laissant sur le bas-côté tout ce qu’il juge inutile : les conventions, les bonnes manières, la routine, la politesse, la recherche de la stabilité. Mais que cherche-t-il, en définitive, au bout de cette route ? La côte Ouest n’est qu’un prétexte, et Hugo se rend compte, lorsque ses frères se disent fatigués de rouler, que lui ne vit que pour cela, justement : la route, et continuer, encore et encore, ne jamais descendre de cette moto qu’il a bricolée lui-même, et qui représente son passeport pour la liberté, la vraie, l’ultime.
En conclusion
Digne successeur de L’équipée sauvage, Easy rider et bien entendu Sur la route, Nous rêvions juste de liberté est un road movie flamboyant et sauvage, un manifeste brûlant pour le droit à vivre comme on l’entend. Certains lecteurs s’agaceront du style volontairement cru et parlé et trouveront les personnages pathétiques, voire antipathiques. J’y ai vu, moi, un éloge magnifique à la vie et à la liberté, servi par une plume à la poésie subtile et délicate, qui sait alterner phases d’actions et moments intimes. Un roman à ne rater sous aucun prétexte, dont l’adaptation cinématographique est en cours.
Nous rêvions juste de liberté d’Henri Lœvenbruck, éditions J’ai lu, 2017.
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