Les trois valses par Kristell Guerveno
Les cris qui provenaient de la cave résonnaient dans la ferme familiale.
Des mugissements d’un animal en train de crever au fond de l’abattoir. Thomas s’affairait au sous-sol depuis un moment mais le gros Simon ne lâchait pas ! Il frappa un grand coup sur le troisième doigt avec son maillet et les phalanges craquèrent comme des coquilles de noix avant de provoquer un hurlement plus intense et aigu que les autres. Thom ferma les yeux pour ne plus l’entendre gueuler. Il ne céderait pas à la pitié, surtout pas maintenant, il avait trop attendu pour ça.
Il s’était préparé pendant des mois. De l’achat de la vieille grange en plein milieu de la campagne, dans une zone totalement inhabitée, jusqu’aux travaux d’aménagement dans la cave, tout avait été consacré à son grand projet. Durant six mois, le jeune Thom avait tout organisé spécialement pour ce jour-là. Le misérable héritage de sa mère était passé entièrement dans l’achat de la ferme et dans ses travaux. Sa tante avait pris ça pour un hommage à sa sœur et l’avait même aidé à retaper la maison. Désormais, elle était prête à engloutir Simon en son sein.
La veille, Thomas avait attiré l’homme jusqu’ici, prétextant un apéritif bien corsé et quelques douceurs plus intimes. Le gros Simon les préférait jeunes mais Thom ne faisait pas ses dix-neuf ans et pouvait facilement en paraître quinze. Quatorze en s’habillant en conséquence. À son grand dam, il devait souvent justifier de son âge pour pouvoir acheter de l’alcool ou sortir en boîte de nuit. Et pour draguer les filles, c’était encore pire... mais peu lui importait. De toute façon, la gente féminine était sans intérêt pour le garçon. Seule comptait la vengeance.
Thom avait trouvé le type par hasard dans un rade rétro de Brétigny-sur-Orge où il livrait des fûts de bière. Là-bas, se produisait chaque soir la vieille Yvonne Printemps, ancienne actrice des années trente et chanteuse d’opérette qui avait tout laissé dans la boisson et s’était perdue dans les bras de ses nombreux amants. Elle était, disait-on, la maîtresse de Pierre Fresnay depuis des années, mais l’acteur était cocufié jusqu’à l’os et à la voir se dandiner explicitement sur scène, on comprenait pourquoi. Il faut dire que la vieille avait encore bien des ressources et une carrosserie toujours en état de marche...
Par la suite, Thom était revenu plusieurs fois pour guetter sa proie, planqué au fond de la salle, caché sous une casquette et derrière sa fine moustache. Il n’avait pourtant pas échappé à l’œil averti d’Yvonne qui l’avait abordé un soir, pendant sa pause. C’était un de ces jours où Thomas doutait encore de pouvoir aller au bout. Il hésitait à se lancer. En serait-il capable ? Et si Simon le reconnaissait ?
Séductrice mais non moins maternelle, la diva avait lu le désespoir sur le visage du jeune homme et l’avait rejoint à sa table, son verre de vodka dans une main, une cigarette dans l’autre.
— Qu’est-ce que tu viens fiche dans ce trou à rats, mon chou ? avait-elle balancé en s’asseyant.
— Rien du tout, M’dame, je viens boire, comme tout le monde, avait répondu Thom d’une voix triste, pour oublier mes problèmes...
— T’es un peu jeune pour ça !, lui avait-elle répondu en souriant. Prends garde à pas te noyer dans ton verre ! On a vite fait de s’oublier soi-même par ici.... Y a qu’à me regarder pour en être convaincu.
Yvonne ponctua sa phrase par un coup de coude amicale puis elle fixa longuement le garçon du regard. Ses lèvres tremblaient, elle paraissait émue par ce jouvenceau, touchée au plus profond de son âme de mère. La chanteuse n’avait jamais eu d’enfants... à son grand désespoir...
Après quelques minutes, elle reprit d’une voix chargée de tendresse :
— Allez va ! Te laisse pas abattre comme ça. La vie est courte, mon chou, crois-moi. Reprends-toi ! Et va au bout de tes rêves... T’as bien des rêves, non ? À ton âge, j’en avais plein la tête moi, des rêves...
Ce fut leur unique échange. Yvonne avait payé un verre au garçon avant de rejoindre la scène en titubant mais elle l’avait convaincu. Définitivement. Oui, il avait un rêve, ou plutôt un dessein. Le lendemain, Thomas était rasé de près. Il avait troqué sa chemise contre un T-shirt psychédélique et attendait le gros à l’entrée du bistro. Après ce qui lui parut une éternité, il vit Simon sortir pour fumer un clope au grand air. Thom le zyeuta un petit moment à coup de sourires pleins de sous-entendus et de regards langoureux. Il savait que l’homme mordrait sans trop de difficultés ; il avait testé ses talents de séducteur sur d’autres types dans des bars homos de Paris. Et les petites fesses athlétiques moulées dans son jean pattes d’eph parlaient d’elles-mêmes.
Lorsqu’il sentit que sa proie était suffisamment accrochée, il attaqua :
— T’aurais du feu, dis ?
— Sûr ! répondit l’homme en dégainant son zippo pour allumer la cigarette. Je t’ai jamais vu par ici, mon mignon. T’attends quelqu’un ?
— Nan, j’suis seul.
Thomas marqua une pause avant de continuer.
— Malheureusement...
— Tu veux que je te paye un verre ? dit l’homme en salivant.
—J’aimerais bien mais... j’ai pas vraiment l’âge..., mentit Thomas.
— Ah ouais...? Et t’as quel âge ?
Le regard du pervers pétillait comme du champagne.
— Quatorze ans et demi. Bientôt quinze !
L’homme afficha un regard inquiet et regarda autour de lui avec suspicion. Thom sentit qu’il risquait de le perdre. Il enchaîna :
— Par contre, mes parents ne sont pas là cette semaine ! Si tu veux, on peut aller chez moi... J’ai tout ce qu’il faut là-bas...
Thom ne pouvait pas être plus explicite et le gros Simon plongea tête baissé.
— Ben on peut dire que tu sais c’que tu veux, toi ! Okay alors, pourquoi pas. T’habites où ?
— Une ferme un peu plus loin dans la campagne. Je suis venu en bus mais si t’as une voiture, on peut y être dans dix minutes.
Trois heures plus tard, l’homme siégeait au milieu de la cave de Thomas, dans des effluves d’alcool et de somnifères, entravé des mains et des pieds, l’attirail de torture disposé sur la table d’à côté. Le jeune homme avait appréhendé le prédateur ; la partie pouvait commencer...
Thom leva bien haut le marteau et balança un dernier coup sur le plus petit des doigts. Le gros hurla de plus belle. Son visage suintait de sueur et de larmes. Une odeur abominable émanait de son corps obèse. L’odeur de la terreur. Thomas esquissa un sourire et se décida à changer d’ustensile. Il n’en pouvait plus de voir cette sale tête dégoulinante de peur et de honte.
Il attrapa le fer à repasser qui chauffait sur son socle depuis quinze minutes et l’écrasa sur la joue de Simon dans un crépitement terrible. La victime poussa un cri puissant mais bref, vite étouffé par sa perte de conscience. C’était pas plus mal comme ça. Thomas pourrait souffler un peu. Il en avait bien besoin. Il essuya le marteau sur un vieux chiffon puis s’épongea le front avec la manche de son pull. Lui-aussi était en nage. Une bonne douche ne serait pas du luxe.
Thom regarda avec dégoût l’homme au physique porcin. Il trônait sur sa chaise en ferraille, pataugeant dans une flaque d’urine et de sang. L’hémoglobine qui commençait à coaguler mélangée à la pisse formait une sorte de mélasse pestilentielle. Désormais, il n’avait plus rien de l’homme respectable qu’il était hier et c’était grâce à Thomas. « Bon boulot » pensa-t-il avant de remonter.
Il fila sous la douche et frotta fort pour faire partir l’odeur. Il avait l’impression d’être imprégné de la puanteur du gros porc qui logeait au sous-sol. Le jeune homme resta une demi-heure sous le jet chaud jusqu’à être complètement décontracté. Ensuite, il s’enveloppa dans une large serviette et s’allongea sur son lit. « Pourrai-je seulement aller jusqu’au bout ? » se demanda Thom. Il n’avait encore jamais tué d’être humain ; on ne s’improvise pas meurtrier comme ça ! Pour autant, il devait le faire. Ce n’était pas un meurtre, c’était une condamnation à mort. Le garçon s’apprêtait à rendre la justice.
Pour se redonner du cœur à l’ouvrage, Thomas fit tourner le trente-trois tours d’Édith Piaf sur la platine. Lorsque L’hymne à l’amour retentit, il pensa d’abord à sa mère. Puis, très vite, trop vite, il pensa à son frère et à son beau-père.
C’était l’été 1960, Thomas avait seulement cinq ans mais il s’en souvenait comme si c’était hier. Il se souvenait des pas de danse que sa mère exécutait avec grâce sur la chanson de la Môme. Il se souvenait de son parfum fleuri quand elle l’embrassait avant d’aller travailler. Et il se souvenait des pleurs et des cris de son frère quand le monstre l’emmenait dans la chambre à coucher. À cet instant, il était terrorisé, incapable de bouger. « Et t’as pas intérêt à venir nous emmerder sinon je te tue, t’as pigé ? Et je tuerai ta maman aussi si tu lui dis quoi que ce soit ! Tu veux pas que je fasse du mal à ta maman, hein ? ». Simon, le beau-père, toisait Thomas, un sourire mauvais sur ses lèvres fines et asséchées comme son cœur. Il le sonda de son regard noir et corrosif jusqu’à ce que le petit fonde en larmes.
Après ça, il arrivait souvent au gamin de faire dans son pantalon et là, en prime, c’était les coups qui tombaient. Dix coups de martinet. Cinq sur chaque cuisse. Maman savait que son conjoint les punissait de la sorte. C’était normal se disait-elle, les enfants font souvent des bêtises. Et il n’était sûrement pas le seul à se prendre des roustes en cas de faute.
« T’es vraiment qu’un sale mioche dégueulasse ! Va te changer maintenant ! Et toi va l’aider au lieu de rester planter là ! » rugissait le beau-père. Alors, son frère le suivait dans la petite chambre d’enfant qu’ils partageaient et, tout grand qu’il était du haut de ses treize ans, il éclatait en sanglots. À l’époque, Thomas ne comprenait pas ce que l’homme pouvait faire à son grand frère dans la chambre parentale mais, à entendre les plaintes qui s’en échappaient, il savait qu’on lui faisait du mal. Comment imaginer une telle atrocité à cet âge-là ? Il le devinerait bien plus tard.
Lorsque maman rentrait enfin de l’hôpital, elle retrouvait ses deux garçons sagement allongés dans leurs lits jumeaux, épuisés, piteux mais indéniablement silencieux. Le beau-père ne manquait pas d’en remettre une couche avant de les nourrir et de les envoyer au lit. Pour ne pas éveiller les soupçons, mais aussi parce qu’il aimait mitonner des petits plats, Simon les nourrissait correctement chaque jour. Ancien cuisinier au chômage, son ventre bedonnant témoignait de cette deuxième passion, après les garçonnets bien entendu...
Dix ans plus tard, Thomas avait reconnu le monstre instantanément : ses lèvres pincées, ses petits yeux perçants, sa bedaine imposante. Un courant électrique avait parcouru son corps en même temps qu’une nausée acide remontait dans sa gorge. Aucun doute possible, c’était le gros Simon et il n’avait pas perdu un gramme !
Thom s’habilla et s’envoya une rasade de whisky avant de redescendre, un seau d’eau glacée à la main. Il jeta la flotte au visage de son adversaire qui s’éveilla en sursaut. Deuxième round. Les cris reprirent immédiatement. Les suppliques aussi.
— Pitié... Arrête ça ! J’ai trop mal ! Mais qu’est-ce que je t’ai fait, Petit ? J’suis désolé si t’as cru que j’allais te faire du mal. Je ne voulais pas... C’est toi qui m’as proposé... Pardon ! Pardon ! Laisse-moi m’en aller ! Par pit...
Thomas mit fin à sa pitoyable tirade en lui envoyant le fer à repasser dans la mâchoire. Si ça continuait, il allait devoir le bâillonner. Sa voix éraillée et mielleuse lui devenait insupportable. Pourtant, il avait besoin d’entendre ses cris pour mettre fin à ceux qui raisonnaient dans sa tête. Thom ferma les yeux. Sa mère hurlait tandis qu’elle détachait le petit corps sans vie qui pendait au plafond de la salle de bain. Mon bébé !!! Noooon !!! Mon chéri ! Mon tout petit !!! Quelque mois plus tard, elle mourait de chagrin et Thomas allait vivre chez sa tante où il attendrait de grandir pour venger sa famille.
Il asséna un grand coup de pied dans le genou du gros pour le secouer un peu avant de passer aux choses sérieuses. Simon miaula ; bientôt, il allait beugler.
Thom lui baissa le froc sur les chevilles et l’homme s’emballa.
— Qu’est-ce que tu fous ?! Nan, arrête ! Arrête !!! Qu’est-ce que tu vas me faire espèce d’enf...
Thom lui balança son coude dans les gencives.
— Reste poli, connard !
Puis, sans hésiter, il écrasa le fer entre les cuisses du bonhomme dans un braillement ininterrompu. Finalement, le gros Simon tomba de nouveau dans les vapes et Thom s’octroya une seconde pause. Il savait que la troisième danse serait la dernière. Il ne pouvait plus reculer désormais.
Le garçon regagna le rez-de-chaussée et se servit un autre verre. Il l’avait bien mérité. Les hurlements de sa mère crissaient dans sa tête et lui filaient la migraine. Il revoyait le corps d’enfant à la peau d’albâtre étendu sur le sol de la salle de bain pendant que la génitrice tentait vainement de le ramener à la vie. C’était le premier mort qu’il voyait et il ne réalisait pas vraiment ce que ça signifiait. Il ne comprit que plus tard, en voyant le petit lit vide à côté du sien, qu’il ne verrait plus jamais son grandfrère.
Le beau-père fit ses valises dans la foulée. Il avait perdu son passe-temps préféré et, en prime, sa compagne n’était plus bonne à rien. Quant au petit, pas encore pubère, il était évidemment sans intérêt. C’est là que Thomas perçut la vérité : son frère était mort à cause du beau-père !
Pendant des mois, il assista totalement démuni au suicide de sa maman. Elle mélangeait allègrement l’alcool et les médicaments, dormait toute la journée, ne mangeait rien à table. Et un matin, son cœur, brisé par le chagrin, s’arrêta de battre.
Thom relança le disque sur la platine. La fin de la chanson semblait un message de sa mère. Un message de l’au-delà. Une promesse de paix. Nous aurons pour nous l’éternité / Dans le bleu de toute l’immensité / Dans le ciel plus de problèmes...
Thom vida un troisième verre de whisky avant de s’enfoncer de nouveau dans le ventre de la ferme. Cette ordure de beau-père pleurait comme une fillette. C’était pitoyable ! Il leva des yeux larmoyants en direction du jeune homme et l’implora de nouveau :
— Pitié, laisse-moi partir ! J’ai compris la leçon ! Je voulais pas, j’te jure... je fais jamais ça d’habitude... je sais pas ce qui m’a pris !
Le cœur de Thomas fit un bond dans sa poitrine. Il tonna :
— Tu te fous de moi ?! Ça fait des années que tu violes de pauvres gamins !... Des années que tu détruits des vies ! Regarde-moi bien : tu ne me reconnais donc pas ? Mon visage ne te dit vraiment rien ? Moi, je te connais Simon...
— Simon ? Mais je m’appelle pas Simon ! Je m’appelle Hervé... Hervé Duteuil ! C’est pas moi que tu cherches, j’te jure. Tu t’es trompé de type... moi, j’te promets, je m’appelle Hervé !
— Tu vas la fermer, oui ?! Tu crois que je t’ai pas reconnu ? T’as pas changé d’un pouce depuis tout ce temps... Toujours gras, toujours obscène... Et je t’ai pas forcé à me suivre, hein ? T’avais hâte qu’on se retrouve seuls tous les deux, gros porc ! Ben t’es servi maintenant... Tu vas payer !
— Mais bordel, j’te dis que c’est pas moi ! C’est la première fois que je me fais brancher par un petit jeune ; jamais ça me serait venu à l’idée de faire une chose pareille, tu peux me croire ! Je suis désolée... mais j’ai rien fait ! Laisse-moi partir ! Par pitié !!!
Le gros pleurait et hoquetait maintenant, il bavait abondamment et son nez coulait de sorte que le mélange visqueux se déversait sur ses cuisses. Thomas eut un haut-le-cœur. Il ne devait pas se faire avoir par ses jérémiades. Le beau-père était un manipulateur, ça non plus il ne l’avait pas oublié. Combien de fois l’avait-il vu jouer la comédie de l’amour avec sa mère ? Et combien de fois lui avait-il juré qu’il allait la tuer ? Thom se cramponna à cette idée pour ne pas se laisser berner. Il était temps d’en finir avec le monstre.
Mais avant de clore leur histoire, le garçon avait un compte à régler avec son ex-beau-père. Il sortit un martinet clouté du tiroir, acheté spécialement pour l’occasion. Et toisa le gros avec défi.
Simon n’en menait pas large et continuait à sangloter comme un gros bébé. Thomas argua :
— Tu t’es pissé dessus gros dégueulasse ! Et tu sais très bien ce qui arrive dans ces cas-là !...
De toutes ses forces, il fouetta cinq fois la première cuisse. Cinq fois comme on le lui avait appris. C’était libérateur, Thom exultait. Il fit de même sur l’autre cuisse qu’il commença à frapper violemment et en cadence. Arrivé à cinq, le jeune homme était lancé, impossible de l’arrêter. Il battait le tempo sur le cuissot rougi de son ennemi avec rage et dégoût. Son frère l’appelait à l’aide, sa mère pleurait à chaudes larmes. Au loin, il entendait le monstre gémir, meugler. Peu à peu, ses cris se firent plus forts et Thom finit par s’arrêter. Un peu décontenancé.
Cette fois, il était temps de conclure. Le jeune homme laissa le gros souffler pendant qu’il rangeait le martinet pour le remplacer par un cutter. Il s’approcha de Simon qui bafouillait une prière incompréhensible mais déjà le garçon ne l’entendait plus.
Lentement, il se pencha sur sa victime pour la dernière valse. Quand le gros vit la lame, il se mit à brailler tout en gigotant sur chaise. Le jeune homme le bloqua en s’asseyant sur ses genoux puis, d’une main, il empoigna ses cheveux et pencha sa tête en arrière. L’animal criait et se débattait comme il pouvait mais Thom tenait fermement son scalpe. Alors, il inspira profondément et fit glisser la lame sur la largeur du cou dans un geste rédempteur. Un jet chaud lui éclaboussa le visage, Thomas ferma les yeux. Il voyait sa mère et son frère lui sourire avec gratitude, leur faciès apaisé pour l’éternité.
Du sang partout. Beaucoup de sang. Ça prendrait sacrément longtemps d’effacer toute trace de son passage mais, pour le moment, il devait se débarrasser du corps. Et vu le gabarit du cadavre, Thom devrait user de stratégies. Il était incapable de porter le mastodonte alors, la solution s’imposait d’elle-même : il l’enterrerait sur place !
Thomas souleva le plancher latte après latte jusqu’à obtenir la surface nécessaire puis commença à creuser. Il creusa longtemps, avec acharnement, ne stoppant que pour s’hydrater et reprendre son souffle. Et quand le trou fut assez profond, il détacha le large corps qui s’affaissa sur le sol comme un sac de pomme de terre. Ensuite, il s’appliqua à le faire rouler en direction du trou.
En le déplaçant, le jeune homme vit tomber quelque chose de sa poche. Il s’interrompit pour le ramasser et constata qu’il s’agissait d’une carte bleue. Il fut saisi d’un doute : Thom n’était pas sûr à cent pour cent de l’identité de sa victime. Il devait en avoir le cœur net. Il retourna la carte bleue et son petit univers s’écroula. La carte était au nom d’Hervé Duteuil...
Ou en PDF http://www.phenixweb.info/sites/default/files/Les-trois-valses-kristell-...
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