L’enfant-bulle par Mathilde Hacourt

Lettre du 2 juin 2012

Si je t’écris à toi, c’est parce qu’on dit que tu écoutes et que tu comprends. J’ai juste besoin de ça, savoir qu’il existe des gens comme toi, des gens qui savent ce que vivre veut dire. Je suis à la fois heureuse et malheureuse, je sais que c’est bizarre mais je suis faite ainsi. Je vois les bonnes et les mauvaises choses se mélanger et se fondre l’une dans l’autre, jusqu’à ce que ça forme une énorme bouillie dans mon cerveau, une espèce d’ouragan où tournent sans cesse le positif et le négatif. Mais je ne veux pas que tu sois triste pour moi, parce que je me dis que je ne suis pas à plaindre et qu’« il y a des gens pour qui c’est bien pire ». Ma mère me répétait tout le temps ça quand je pleurais à cause d’un genou écorché ou d’un jouet cassé. Et c’est vrai en un sens, ce n’est pas parce que je dois manger mes petits pois que le monde s’arrête de tourner. Une fois que c’est passé, on se remet à écouter des chansons gaies. Et à travailler. Et à passer le balai dans la cuisine. Il y a des gens qui sont franchement plus à plaindre que moi. Beaucoup plus. Y en a qui n’ont pas tiré le bon numéro dans la vie. Y en a qui sont juste des trophées que leurs parents exhibent aux voisins pour ensuite être oubliés sur une vieille cheminée toute poussiéreuse. Et y en a d’autres qui veulent simplement avoir la paix. Pendant ce temps-là, je fais de mon mieux pour ne pas être une dégénérée, une erreur de la nature. Je me sens incomplète, comme si j’étais née avec un truc en moins. Un truc qui aurait pu m’aider à voir le monde comme n’importe qui et à arrêter de tout le temps me poser des questions, un truc qui m’aurait permis de vivre normalement. On m’a toujours accusée de poser trop de questions, d’être « chiante à vouloir me compliquer la vie ainsi », sauf que j’y peux rien... Je ne peux pas m’empêcher de tout voir, de chercher à aller au fond des choses… Mais les gens n’aiment pas qu’on fasse ça, je l’ai compris. Ils préfèrent marcher droit, voir le verre à moitié plein et ne râler que pour des choses bien quadrillées et prémâchées par la télévision, comme une vague d’immigration ou la folie meurtrière d’un voisin « qui aurait très bien pu être le nôtre ».

Je suis entrain de relire ce que j’ai écrit, et ça me perturbe parce que ça ne me ressemble vraiment pas. Ou peut-être que si, mais je n’ose pas me l’avouer. En tout cas, je trouve que mes mots suintent l’amertume, et c’est pas fait exprès. Je ne veux pas devenir une de ces vieilles personnes aigries, « endurcies par la vie » comme on dit, et qui ne veulent plus jamais être gentilles ou s’émerveiller sur quoi que ce soit parce qu’on ne la leur fait plus à elles. Je ne suis pas sûre de comprendre cette expression, mais moi je veux bien « qu’on me la fasse encore », je veux bien être déçue, trompée ; du coup, comme ça je pourrais encore m’étonner. Je ne veux pas finir désenchantée de la vie, puisque c’est tout ce qu’on a !

 

Lettre du 14 juin 2012

Le problème avec moi, c’est que je suis coincée dans une bulle. Je ne suis pas entrain de faire des allégories, je parle d’une vraie bulle. Je suis faite comme ça, avec une espèce de petit globe invisible autour de moi qui me protège de tout : des dangers, des mauvaises personnes et de la vie. Je l’ai construit petit à petit. La structure principale est bâtie sur le polyéthylène le plus translucide et résistant qui soit : celui fait à base d’enfance ratée et de manque de confiance en soi. Les parois de verre blindé sont des ajouts postérieurs : celle-ci est faite de colère rentrée, celle-là de « problèmes à la maison » ou de « problèmes à l’école », et puis d’incompréhension, de vie sociale au ralenti… Le résultat est plutôt encombrant mais j’ai fini par m’y habituer. Les gens évitent de s’approcher de moi parce que la bulle prend énormément de place. Il faut aussi dire qu’elle est tellement épaisse qu’elle laisse difficilement passer les sons, du coup quand je parle avec des gens, on ne se comprend jamais et ça finit toujours mal. J’ai donc décidé de ne plus parler du tout, ça crée trop d’ennuis ! Tout le monde me regarde bizarrement, je vois bien qu’on me juge et que personne n’arrive à me comprendre, mais je ne me sens pas la force de changer, cette bulle est devenue vitale pour moi. Entrer en contact direct avec le monde risquerait de me tuer sur le coup. C’est ce que les médecins ont dit. Mes parents s’inquiétaient de ce dôme miniature qui ne l’était plus tant que ça, mais ni les maçons ni les docteurs ne savaient trop quoi faire. La bulle était trop solide pour être brisée par la force, et même si c’était possible, le choc aurait été fatal pour moi.

J’ai commencé à trouver des trucs. Vu que je n’avais pas d’amis, je m’en suis inventé. J’ai décoré ma bulle avec des arbres, des oiseaux, des végétaux imaginaires, parsemant le tout de quelques aventures rocambolesques sorties des méandres de mon cerveau. Je crois que c’est à ce moment-là que j’ai vraiment arrêté de vivre… Je m’anesthésiais à grands coups d’imagination, sans remarquer ce qui m’arrivait. Ou plutôt ce qui ne m’arrivait plus, puisque je ne faisais plus rien. Avec le temps, ma bulle a commencé à se salir et s’opacifier, du coup les gens ne me voyaient plus vraiment et passaient à côté de moi sans faire attention. J’ai bien essayé de la nettoyer, mais je crois que ce n’était pas qu’une question de poussière… Je me suis transformée peu à peu en une sorte d’extraterrestre : j’observais et je voyais tout, mais depuis une autre planète, très loin de tout.

 

Lettre du 1er juillet 2012

Voilà pourquoi j’ai pris une bonne résolution ! J’essaye de reprendre ma vie là où je l’ai laissée, de faire une bonne cure d’existence et de me réhabituer à être là. Je veux dire vraiment là, pas juste un fantôme qui passe sous le nez du monde entier. En fait ça me terrorise, parce que je me sens toute nue, toute fragile. J’ai l’impression que l’univers entier n’attend que ça : que je sorte de ma bulle pour me dévorer. Je ne peux pas m’empêcher de m’imaginer des tas de scénarios catastrophes qui me paralysent. J’aimerai bien pouvoir m’arrêter de penser. Il ne faut plus que je pense. Plus jamais. As-tu déjà ressenti ça ? L’envie de dormir pendant mille ans. Ou juste de ne pas vouloir exister. Ou de ne pas te rendre compte que tu existes. C’est peut-être malsain comme genre de pensée, mais quand je suis dans cet état, c’est ce que je veux. Voilà pourquoi j’aimerai éteindre mon cerveau… Comment les gens normaux font-ils pour agir, exister sans y penser ?

 

Lettre du 4 juillet 2012

Parfois je lève les yeux au ciel pour regarder la lune ; ça me donne l’impression d’être en harmonie avec le monde. Dans ce genre d’instant, j’arrive à faire disparaître complètement ma bulle. Ça m’a fait bizarre au début, parce que soudainement tout devient plus limpide. Les bruits sont plus clairs, les lumières plus fortes, les formes se précisent et ma maladresse s’efface… comme si j’avais vécu dans une petite cave sombre loin de tout et qu’une fenêtre donnant sur l’extérieur s’était brutalement ouverte. Je regarde le ciel et me laisse envahir par le vide. J’ai l’impression d’être dans un dôme immense, comme dans une boule à neige. Je me dis que les étoiles blanches qui scintillent ne sont peut-être que des trous dans le verre noir du dôme, et que si je regardais suffisamment loin, je pourrais voir la blancheur étoilée cachée derrière tout ça. Ce serait une couleur plus vive et plus pure que tout le reste, mais qui ne brûlerait pas les yeux, vaste, immense et silencieuse. Je pourrais alors respirer un bon coup, comme pour plonger dans une piscine, sauf que c’est vers la vie que je m’élancerais.

Au début je voyais ma bulle comme un petit nid douillet, mais je me rends compte avec le temps qu’elle a de nombreux effets secondaires et une accoutumance très forte. Elle filtre toutes les belles choses et ne me montre plus que la réalité crue. Du coup, je suis déprimée. Et plus je déprime, plus je me renferme dans mon cocon-bulle. Je vis dans une infusion un peu trop corsée de mauvaises pensées. Je suis en classe et je regarde tous ces élèves, imbéciles heureux entrain de faire enrager le prof en lui balançant des piques. Ils ne pensent déjà plus à tous ces inadaptés qu’ils ont martyrisés, ils oublient avoir insulté des timides et frappé des fragiles. À leur place, j’aurais honte et je demanderais pardon sans arrêt, mais eux, ils s’en foutent. Même les profs ont fini par s’habituer à leur petit manège, si bien que plus personne ne réagit. Il y a des jours où j’aimerais me lever et leur casser la gueule une bonne fois, qu’ils sachent ce qu’on ressent quand les rôles sont inversés. Mais on ne fait pas partie du même monde. Pas encore. Je les regarde et je ne peux pas m’empêcher de penser à leurs parents, qui foutent rien non plus pour les faire grandir ; je me demande comment des adultes ont pu faire des enfants pareils. Je les regarde et je les vois, plus tard, toujours entrain de faire du mal. Je peux pas m’empêcher de me dire qu’il vont grandir et frapper leurs copines, qu’ils feront rien pour arranger le monde et améliorer la vie des autres qui en bavent déjà suffisamment comme ça. Je ferais n’importe quoi pour arrêter de penser à ça. Je ferais n’importe quoi pour marcher droit, sans essayer d’éviter les lignes des pavés ou sans compter les mégots de cigarettes abandonnés à quelques centimètres d’une poubelle.

 

Lettre du 20 juillet 2012

J’ai compris que ma bulle n’avait aucun effet secondaire. Elle fonctionne juste comme une cocotte-minute : elle renferme toutes mes émotions qui, ne sachant sortir, se mettent à gonfler, gonfler, à prendre de plus en plus de place pour finalement devenir ingérables. Mon cerveau se transforme en montagnes russes ; il passe de la rage à la tristesse en un clin d’œil. Il faut juste que je laisse la pression s’échapper, sinon je vais finir par exploser.

 

Lettre du 25 juillet 2012

Il fallait bien que ça arrive je suppose. La bulle est trop rouillée, trop blindée pour s’ouvrir délicatement et me laisser le temps de m’accoutumer à mon nouvel environnement. Elle explose en crises de colère ou de larmes, et je suis tellement emportée par les débris de mon ex-protection que je me retrouve par terre, tremblante, la mémoire trouée d’éclats d’o-bulle. Ma colère me fait peur, j’aimerais bien tout arrêter et retourner dans mon petit monde, tant pis pour les effets secondaires et mes bonnes résolutions, sauf que j’ai senti le goût de la réalité. Maintenant que je sais ce que c’est, je ne pense plus pouvoir m’arrêter de vivre.

 

Lettre du 3 août 2012

La prof de français nous a donné un poème de Earl Reum aujourd’hui, il faut absolument que tu le lises !

Un jour, sur une feuille de papier jaune aux lignes vertes

Il a écrit un poème

Et il l’a appelé « Chops »

Parce que c’était le nom de son chien

Et que c’était de ça que ça parlait

Et son professeur lui a mis A

Et l’a félicité

Et sa mère l’a accroché sur la porte de la cuisine

Et l’a lu à ses tantes

Cette année là, le Père Tracy a emmené tous les enfants au zoo

Et il les a laissés chanter dans le bus

Et sa petite sœur est née

Chauve, avec de minuscules ongles aux orteils

Et son père et sa mère s’embrassaient beaucoup

Et la fille qui habitait à côté lui a envoyé

Une carte de la Saint-Valentin avec une rangée de cœurs

Et il a du demander à son père ce que les cœurs voulaient dire

Et son père le bordait tous les soirs dans son lit

Il était toujours là pour le faire

 

Un jour, sur une feuille de papier blanc aux lignes bleues

Il a écrit un poème

Et il l’a appelé « Automne »

Parce que c’était le nom de la saison

Et que c’était de ça que ça parlait

Et son professeur lui a mis A

Et lui a demandé d’écrire plus lisiblement

Et sa mère ne l’a pas accroché sur la porte de la cuisine

À cause de la nouvelle peinture

Et les gamins lui ont dit

Que le Père Tracy fumait des cigares

Et laissait les mégots sur les bancs de l’église

Et que parfois ils brûlaient et laissaient des marques

Cette année-là, sa sœur a eu des lunettes

Avec des verres épais et une monture noire

Et la fille qui habitait à côté a ri

Quand il l’a invitée à aller voir le Père Noël

Et les autres gamins lui ont expliqué pourquoi

Son père et sa mère s’embrassaient beaucoup

Et son père ne le bordait jamais le soir dans son lit

Et quand il pleurait pour qu’il le fasse

Son père se mettait en colère

 

Un jour, sur une feuille arrachée à son cahier

Il a écrit un poème

Et il l’a appelé « Innocence: une question »

Parce que c’était la question qu’il se posait sur sa copine

Et que c’était de ça que ça parlait

Et son professeur lui a mis A

Et l’a regardé fixement, d’un drôle d’air

Et sa mère ne l’a jamais accroché sur la porte de la cuisine

Parce qu’il ne lui a jamais montré

Cette année-là, le Père Tracy est mort

Et lui, il a oublié comment se terminait

Le Credo des Apôtres

Et il a surpris sa sœur

En train de se faire un type sur la véranda

Et son père et sa mère ne s’embrassaient jamais

Et ne se parlaient plus

Et la fille qui habitait à côté

Se maquillait trop

Ça le faisait tousser quand il l’embrassait

Mais il l’embrassait quand même

Parce que c’est ce qui se fait

Et à trois heures du matin il se bordait lui-même dans son lit

Pendant que son père ronflait fort

 

C’est pour ça qu’au verso d’un sac en papier kraft

Il a essayé un autre poème

Et il l’a appelé « Absolument rien »

Parce que c’était vraiment de ça que ça parlait

Et il s’est mis un A

Et il a tracé une putain d’entaille sur chaque poignet

Et il l’a accroché à la porte de la salle de bains

Parce que cette fois il n’était pas sûr

De pouvoir atteindre la cuisine

Quand j’ai lu ce poème pour la première fois, j’ai d’abord eu peur parce que je comprenais vraiment la fin, si tu vois ce que je veux dire... Je ressentais la même chose que le garçon en question, la même idée nous était passée par la tête. C’est alors que j’ai réalisé une chose : ce genre de chose a déjà été vécue, même si c’est la première fois pour moi. D’autres gens sont passés par là avant moi. Tout ce que j’ai fait, d’autres l’ont fait avant. Les chansons que j’ai aimées, d’autres les ont écoutées. Et les livres que j’ai lus, d’autres les ont lus. D’autres gens ont déjà vu la neige ou pleuré après une rupture, et me dire ça, ça me rassure parce que je sens l’harmonie du monde, je me sens faire partie de quelque chose, je me sens normale. J’ai compris que, comme dans le poème, la vie ne serait jamais simple, mais que si d’autres étaient passé par là avec succès, alors je devrais pouvoir faire face. Non ?

Ma bulle commence à devenir de plus en plus translucide et légère, je fais plein d’efforts pour m’impliquer mais ce n’est pas toujours simple, il suffit d’un rien pour que je me referme d’un seul coup et tout est à refaire. Je m’entraîne à la faire disparaître, comme quand je regarde le ciel, mais ça demande beaucoup de concentration... J’espère qu’un jour j’arriverai à reprendre les choses comme elles étaient avant que j’arrête de vivre. J’espère qu’un jour je pourrai être comme tout le monde.

 

Lettre du 16 décembre 2012

J’aurai voulu pouvoir lui dire. Lui expliquer que c’était la première fois de ma vie que je me sentais à ma place. Il avait un morceau de mer dans ses yeux. Je me serais crue au temps de la ruée vers l’or, où les rivières soudainement frappées par un rayon de soleil se mettaient à scintiller toutes en paillettes, poussières et pépites d’or. J’étais une orpailleuse qui venait de découvrir un trésor inespéré. Je me souviens avoir pensé que si ses yeux étaient les petits cours d’eau où se déversait de l’or érodé, à l’origine de tout ceci devait se trouver un filon gigantesque. Il devait avoir une montagne de trésors enfouis, bruts, sauvages, à l’intérieur de lui. J’aimerais pouvoir te dire que, lorsque nous nous sommes regardés, ma bulle a immédiatement fondu. Mais c’est tout le contraire qui s’est passé. Elle s’est mise à gonfler doucement et s’est étendue jusqu’à pouvoir l’accueillir à l’intérieur.

Je me suis sentie complète. Entière. Comme si j’étais achevée. Ce jour-là, j’ai compris deux choses : je ne serai jamais comme tout le monde, mais ça ne m’empêchera pas de vivre, et en plus j’avais trouvé quelqu’un pour m’accompagner…

 

Lettre du 1er janvier 2012

Ma rééducation en tant que démissionnée de la vie avance bien. C’est un peu violent par moments, parce qu’à rester enfermée dans une bulle pendant des années, on amasse beaucoup de colère, de rancœur et de mots qui ne demandent qu’à être dits. Un jour j’aimerais bien réussir à me dire qu’il n’y a personne à haïr. Parce qu’un jour je serai tante, mère, marraine… et je ferai des tas d’erreurs, qui donneront des tas de raisons à mon entourage pour me détester, tout en espérant qu’ils ne le feront pas. On pourrait tous se réunir et être tristes les uns pour les autres, discuter des personnes à haïr, des rancœurs jamais effacées, en vouloir aux gens pour ce qu’ils ont fait ou non, pour ce qu’ils ne savaient pas ou pour ce qu’ils ne savent toujours pas… On peut toujours trouver quelqu’un à qui en vouloir. J’en veux à ceux qui m’ont fait du mal et m’ont poussée à ne plus exister, mais alors il faudrait aussi que j’en veuille aux parents de ces gens qui les avaient mal traités et aussi aux parents des parents qui étaient trop sévères et… On est ce qu’on est pour des tas de raisons différentes, et on ne pourra jamais toutes les connaître. Mais même si on ne sait pas vraiment d’où on vient, on peut choisir où on va. Je sais, tu me diras que ça ne répond pas à toutes les questions, mais ça aide à avancer. J’espère que quand j’aurai des enfants et qu’ils pleureront parce qu’ils se sont écorchés les genoux en tombant, je ne commencerai pas à leur parler des petits Africains qui meurent de faim et de tout ceux qui souffrent partout dans le monde. Savoir qu’ils y a des gens qui sont plus à plaindre que toi ne change pas ta douleur, parce que c’est normal de ressentir des choses même si il y a des trucs encore pires, et c’est normal d’avoir besoin d’en parler. Et je suis heureuse d’avoir trouvé quelqu’un avec qui en parler. Bien sûr, je suis encore loin d’en avoir terminé. Après tout, ce n’est pas parce que j’ai recommencé à vivre qu’il ne me reste plus rien à faire. Je dois continuer à écrire mon histoire tous les jours, le point final ne tombera qu’avec le marteau sur les clous de mon cercueil. Je veux juste que tu saches que j’ai traversé une très mauvaise période et que te parler m’a aidée à me sentir moins seule. Parce qu’il y a des gens qui disent que ce genre de chose n’arrive jamais, ou qu’il faut faire face parce qu’il y a toujours pire. Et il y en a d’autres qui oublient que ce genre de chose existe, parce qu’une fois devenu adultes, ils font comme si ils n’avaient jamais eu d’enfance, comme si ils étaient nés vieux en suçant la maturité de leur pouce… On va tous devenir des pères, des mères ou des tantes, et toute notre vie ne sera plus qu’une histoire racontée à nos petits-enfants. Mais maintenant, ces moments ne sont pas encore devenus des vieilles photographies oubliées. Car c’est entrain de se passer. Je suis là. Et je compte bien en profiter.

 

Ou en PDF ici http://www.phenixweb.info/sites/default/files/L-enfant-bulle-mathilde-ha...

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