Le bruit des bottes par Christophe Tabard

C’est à l’occasion de travaux de rénovation que les ouvriers, en cassant un mur du dernier étage de cette maison bourgeoise de province, tombèrent sur une pièce secrète. Aux murs, des photos sous cadre d’une blonde aux yeux clairs, des fouets, des menottes, des chats à neuf queues, des crochets, des cagoules… et un cadavre sur un lit. Parfaitement conservé, un homme vêtu d’une robe, allongé, l’air paisible. Entre ses mains, un cahier.

 

Jour 1 – quelques jours après le 14 juillet 1943

La salope !

Je l’ai déjà crié mille fois mais ça fait du bien de l’écrire. Et puis, si on me lit, on saura réellement qui était Madame Rosie. À quoi peut-on s’attendre de la part d’une tenancière de bordel, de toute façon ? Ne dit-on pas « parole de pute » ? Il faut que je laisse une trace écrite, sinon, on ne me croira jamais. Je n’ai pas déserté, je ne suis pas un traître. C’est elle qui m’a piégé avec son patriotisme à la noix. « On couche peut-être avec les Allemands mais on n’en est pas moins patriote ! » m’avait-elle dit le jour de l’invitation. Patriote mon cul ! Elle voulait seulement sauver ses miches au cas où… Sauver son juif et l’exhiber si le vent tournait ! Le comble, c’est que je ne suis même pas juif, mais ça c’est une autre histoire.

 

Jour 2

Je suppose qu’on est le lendemain d’hier mais je n’en suis pas sûr. Je n’ai pas de calendrier. Elle ne veut pas me donner de journaux ni de montre. « Les nouvelles de la guerre pourraient te déprimer, mon chou. Et pour la montre, t’as pas de train à prendre que je sache ! ». C’est la petite Julie qui m’avait rapporté ces paroles.

Misère de moi, comment en suis-je arrivé là ? Je le sais et ça me trotte dans la tête. Quel con, non mais quel con ! Les femmes, ma plus grande faiblesse. Ma perte.

Je m’appelle Léon, Auvergnat bien de chez nous de père en fils depuis que l’Auvergne existe. J’ai fait la guerre comme on va à la pêche, en sifflotant. Ligne Maginot, l’attente puis finalement les Allemands qui nous cueillent par la porte de service à l’heure du petit-déjeuner. Un coup de pied au cul et l’armée la plus puissante du monde a renvoyé ses troufions chez eux comme ils étaient venus ; une main devant, une main derrière. Je ne m’en plaignais pas particulièrement. Je n’avais rien contre les Allemands. Pétain était au pouvoir, l’armistice était signé. Tout allait bien.

Je pouvais enfin retourner à mon métier d’instituteur et à ma passion, le Gavroche, un claque où j’avais mes petites habitudes avant-guerre. Une crèche bien comme il faut tenue par Madame Rosie (la salope !) qui était mon petit paradis et qui allait vite devenir mon enfer.

Elle m’avait proposé de fêter le 14 juillet, malgré l’interdiction faite par le Maréchal. « Uniquement les bons clients » m’avait-elle dit. Je m’étais fait beau et pimpant, parfumé comme un galant à son premier rendez-vous. Je lui avais même apporté un gros bouquet de roses rouges qu’elle avait accepté à grands renforts de petits couinements bruyants et ravis. J’aurais dû me méfier. J’étais le seul client. Mais peut-être les autres invités étaient-ils déjà en train de compter fleurette aux étages supérieurs, ou bien étaient-ils en retard ? Quelque part, je m’en foutais. Lisa, une de ses filles, ma préférée, bien charpentée comme je les aime, m’avait servi une flûte de champagne. Je l’avais bu d’une traite, impatient de commencer les festivités mais les étoiles ont commencé à scintiller, le sol s’est dérobé et puis plus rien.

Le néant.

Je m’étais réveillé là, dans le Donjon, ainsi que le nommait la taulière.

La salope m’avait drogué. « C’est pour votre bien, Monsieur Léon ! La patronne veut pas qu’il vous arrive du mal, rapport à ce que vous êtes... ». La petite Julie m’avait lancé ça en fixant mon entrejambe puis s’était glissée dans le passe-plat qui redescendit en silence.

Je suis quoi ? Qu’est-ce qu’elle me racontait celle-là ? Ce n’est qu’un peu plus tard qu’elle m’expliqua en revenant par le même système m’apporter mon premier repas. « Madame Rosie vous a mis là pour pas que les Allemands vous attrapent. Elle a aussi muré l’entrée comme ça personne soupçonnera que vous êtes ici. On cassera le mur quand tout ira mieux dehors. Parce que vous savez, Monsieur Léon, c’est la chasse aux juifs dehors ! »

 

Jour 3

Un malentendu ! Un simple malentendu. J’en ai ri aux larmes pour ne pas pleurer de rage. Je suis enfermé dans la pièce spéciale maso parce qu’elle pense que je suis juif ! Louis XVI aussi avait un phimosis et il n’était pas israélite pour autant. Du moins, je ne crois pas. On m’a circoncis quand j’étais petit et ça va beaucoup mieux, merci. Je peux honorer ces dames sans douleur. J’espère que je ne finirai pas guillotiné. Il paraît que ce n’est pas douloureux d’après son inventeur, mais quand même ! J’ai entendu dire que les Allemands avaient des petites guillotines portatives. Aurai-je un destin de roi ?

 

Jour 4

Elles ne m’ont pas cru. La petite Julie a transmis le message à Rosie mais elle a dit qu’elle ne voulait prendre aucun risque. Que c’était pas bien d’inventer des histoires. Je n’aime pas Julie. Pas mon genre. Trop maigre. Trop petite. Un sac d’os. Moi je les aime grandes et à forte poitrine, comme Lisa. Mais Lisa ne rentre pas dans le passe-plat alors je dois me contenter de celle-là. Elles m’ont sapé le moral. Je n’aurai plus mes tickets de rationnement. Les Allemands doivent se poser des questions, c’est sûr ! Et à l’école ? Mes élèves, que deviennent mes élèves sans moi ? Et mon père ? Il va en penser quoi de tout ça, mon père ?

 

Jour 10 ou 11 ou 12

Je perds un peu la notion du temps. C’est la longueur de ma barbe qui me donne une idée du temps qui passe. Je n’aime pas avoir les poils qui poussent, ça me démange et ça me donne un aspect repoussant. J’aime avoir l’air présentable. C’est important de faire bonne figure, surtout pour moi qui suis en contact avec les enfants. L’image qu’on donne de soi-même en dit long sur la personnalité. Mais faute de grive, on mange des merles alors je me fais violence. Je sais que ça ne durera pas longtemps. Du moins je l’espère...

J’ai pris le temps de faire le tour de la pièce à la lueur de la bougie. J’ai un peu que ça à faire de mes journées. C’était la chambre spéciale où des malades venaient se faire punir par Madame Rosie. Ça doit lui manquer depuis qu’elle m’en a offert l’exclusivité. Il y a des crochets, des menottes, des fouets, des martinets, un lot de bougies. Tout l’arsenal pour dispenser une bonne punition à ces gros bourgeois qui viennent se soumettre volontairement, se faire corriger et couler de la cire brûlante sur les tétons ou ailleurs, je n’ose l’imaginer ! C’est Rosie en personne qui s’occupait de ça. Les photos sous cadre d’Yvonne Printemps qui ornent les murs devaient la motiver. Elle détestait Yvonne Printemps. Tous les clients du Gavroche connaissent l’histoire maintes fois répétée de sa montée à Paris, avant la Grande Guerre. De l’exclamation de Maurice Chevalier en voyant la poitrine généreuse de Rosie et qui en avait tiré le nom de sa revue « Ah les beaux nichons ! ». Comment, soi-disant, Mademoiselle Printemps lui avait volé le rôle de sa vie et l’avait empêché de faire carrière dans la capitale. Je suppose que les portraits d’elle dans cette pièce devaient la motiver pour frapper plus fort et avec entrain. Une source d’inspiration, en somme…

Il fait une de ces chaleurs sous les toits. Je sue à grosses gouttes. J’ai gardé mon caleçon mais je sens que je vais bientôt finir à poil si ça continue.

 

Jour cerise

Il y avait des cerises aujourd’hui au repas. Je vais me servir de la nourriture comme repère temporel, fruits et légumes de saison. Rosie a toujours réussi à se débrouiller pour avoir de la qualité, malgré le rationnement et l’occupation. Elle sait y faire avec les Allemands. Marché noir et faveurs sans doute.

Je pense à mon père. Il doit s’inquiéter. Je me rappelle de ses paroles sur le quai de la gare de l’Est juste avant mon départ sur le front : « Garde ton masque à gaz à portée de main, petit, avec les Boches on sait jamais ! ». Lui, il en avait respiré une bonne goulée à Ypres pendant la Grande Guerre. Tout foutraque il en était resté. Moi, je souhaiterais presque qu’ils arrivent et qu’ils défoncent ce satané mur. J’écoute attentivement et, parfois, je crois entendre le bruit des bottes allemandes mais ce n’est pas pour moi.

 

Jour cerise + 2

J’y ai pensé toute la journée d’hier. Je souhaiterais en finir. Mais je ne voudrais pas me louper et agoniser pendant des heures. J’ai peur de la douleur. Si seulement il y avait une fenêtre, je me balancerais de ce troisième étage et ce serait réglé vite fait bien fait mais il n’y a que des murs. Ces satanés murs contre lesquels je pourrais me précipiter la tête la première mais je ne suis pas un courageux. Je suis un lâche et ça m’énerve encore plus. Je me dégoûte.

 

Jour cerise + 3

J’en peux plus des putes et du champagne. Je n’aurais jamais crû penser ni même écrire ça un jour mais c’est la vérité. Marre des maigres que m’envoie Rosie. Marre de ce Moët & Chandon qui me donne des aigreurs d’estomac. Je voudrais du rouge, au moins je dormirais bien et je ne ferais pas de cauchemar. Hier soir, j’ai cru voir quelque chose bouger dans la pénombre. Un corps élancé glissant furtivement. Qui me regarde. En y repensant, j’ai l’impression que ça fait plusieurs jours que ça dure. Foutu champagne !

 

Jour concombre

On doit être au mois d’août. La petite Julie est venue mais je l’ai renvoyée comme une malpropre. Elle m’a apporté des robes. « Madame Rosie dit que c’est trop risqué de laver vos pantalons ici. Il n’y a pas d’homme et ça pourrait attirer les soupçons des Allemands et des collabos qui viennent ici ». Elle a dit : « De toute façon, personne vous verra ici alors il n’y a pas de problème pour porter ça ». Je l’aurais tuée. Mais elle m’avait aussi apporté 2 bouteilles de Pommard 1934 alors j’ai été clément.

 

Jour concombre + 3 ou 4

J’ai pas quitté le lit depuis la dernière visite. J’ai bu les deux bouteilles coup sur coup et j’ai dû m’évanouir ou sombrer dans le coma. C’est la première fois que ça m’arrive. D’habitude je tiens bien l’alcool. Ça doit être le stress. J’ai dévoré la salade composée et mis une claque au camembert. Je me suis enfilé une miche entière de pain. J’ai jamais souffert de la faim, même au front. Surtout au front. On a tué le temps en mangeant. Notre lieutenant était cuisinier dans le civil. Je me rappelle de rognons de veau qu’il nous avait préparés avec des pommes de terre cuites au four badigeonnées de beurre avec une petite sauce aux cèpes. Un délice !

J’ai comme une envie de vomir mais je serre les dents, pas question d’empester la pièce avec une odeur de vomi. Ça persiste longtemps ce genre d’odeur, même en nettoyant à grandes eaux.

 

Jour poivron

Je tuerais pour un bain bien chaud. Je sais, j’ai des goûts de luxe mais ma tête me gratte et mon corps entier me démange. J’ai toujours été très méticuleux rapport à mon hygiène corporelle mais là, avec seulement un robinet d’eau froide, c’est difficile de faire attention à soi. Je déteste le froid et rien que l’idée d’avoir à me raser à l’eau froide, j’en ai la colonne vertébrale qui tressaille.

Julie sent bon. Elle se baigne tous les jours, elle. Rapport aux clients. Il ne faut pas qu’ils consomment de la viande avariée.

 

Jour poivron + 2

J’ai essayé de me glisser dans le passe-plat mais j’ai juste réussi à m’écorcher le dos. Ça fait un mal de chien ! Je me suis plié dans tous les sens mais il n’y avait rien à faire. Je suis trop grand.

Une fois, une troupe de cirque est venue en ville. Il y avait un contorsionniste plus grand que moi qui s’était glissé dans une valise deux fois plus petite que ce maudit passe-plats. Sur le coup, je n’avais pas trouvé le spectacle si grandiose mais j’avoue qu’aujourd’hui je lui tire mon chapeau. Bravo l’artiste !

 

Jour poivron + 9 ou 10 ou 11 ou plus

Je m’ennuie à mourir. Je pourrais noircir les pages de ce cahier mais je n’en ai pas envie. Écrire ne m’occupe pas. Ça n’a jamais été une passion ni un passe-temps. Si je le fais depuis que je suis ici, c’est uniquement pour témoigner. Laisser une trace.

Hier, Julie m’a apporté tout le nécessaire pour me raser ainsi qu’un broc d’eau chaude. J’en ai pleuré. On est bien peu de chose parfois. J’ai la peau du visage comme les fesses d’un bébé. Je sais que ça ne va pas durer mais j’apprécie l’instant. Je me touche et retouche le visage. Quelle félicitée !

 

Jour marron

Les nuits sont plus fraîches maintenant et j’ai enfilé une de ces maudites robes. Si ma mère me voyait ! Julie m’a aussi apporté une couverture. Elle m’a dit que les Allemands s’étaient pris une raclée, là-bas, chez les Russes. Que ça va aller mieux. Qu’il faut que je m’accroche. Elle a l’air de s’inquiéter pour moi. Brave petite. Je l’aime bien au fond mais je vois bien à sa façon de me regarder que quelque chose cloche. Je dois vraiment avoir une sale gueule !

On parle un peu tous les deux. Ça me fait du bien de parler à quelqu’un, d’entendre une autre voix que la mienne. Même si je ne suis pas seul dans cette pièce, je le sais. Je ne l’ai pas encore vue mais je sais qu’elle est là à m’observer. Je suis sûr que c’est elle qui m’a remis la couverture sur moi pendant que je dormais. Je sens son parfum. Une eau florale de roses. Des roses d’Égypte peut-être.

 

Jour marron + 1

J’en étais sûr !

Je savais bien qu’elle était là. Je l’ai vu hier soir dans un des angles de la pièce au moment où je soufflais la bougie.

Yvonne Printemps !

Quand j’ai rallumé, elle avait disparu mais c’était bien elle. Dans un fourreau nacré et un collier de perles énormes autour du cou.

J’ai dormi comme un bébé, le sourire aux lèvres et rassuré de savoir que c’était elle et non pas un de ces énormes rats qui trouvent le moyen d’entrer, même s’il n’y a pas de passage.

 

Jour marron + 10

Il fait de plus en plus froid. Heureusement, on me fait passer des plats chauds et qui tiennent au corps ; potée, cassoulet, pot-au-feu, soupes. J’ai aussi droit à du vin mais j’évite de trop boire sinon je ne vois pas Yvonne. Je sais qu’elle n’aime pas que je m’enivre. Elle préfère les hommes sobres. Je la sens qui s’assied sur le bord de mon lit tous les soirs maintenant. J’ai bien essayé de la toucher, de lui prendre la main mais elle se dérobe. Alors je lui parle dans le noir pour essayer de la rassurer mais elle ne me répond pas. Elle doit être timide. Je dois faire mes preuves. Être galant et prévenant. Ne pas brusquer les choses.

 

Jour orange

Comment fait-elle pour avoir des oranges ? Les capacités de débrouillardise de Rosie m’étonneront toujours. Il y en avait deux dans le passe-plat. J’en ai mangé une et laissé l’autre pour Yvonne mais, le lendemain, l’orange était toujours là. Peut-être n’aime-t-elle pas les oranges ?

 

Jour orange + 2

Ça y est ! Enfin ! Elle s’est décidée à se laisser regarder. C’est vraiment une femme pour moi ; toute en robustesse et fragilité à la fois. Grande et forte. La femme de ma vie. Elle m’a regardé longtemps avec ses grands yeux clairs et je n’ai rien dit. Je lui ai tellement parlé ces derniers temps que j’ai préféré me taire. Savourer l’instant. Ne pas tuer la magie qui s’installait entre nous. On s’est regardé comme ça jusqu’à ce que je m’endorme avec son sourire dans la tête.

Je crois que je suis amoureux.

 

Jour dinde

Aujourd’hui c’est Noël. J’ai eu droit à de la dinde et un morceau de bûche glacée que je n’ai pas touché, il fait vraiment trop froid. C’est au coin du feu que ça se mange une bûche glacée, pas dans un grenier où il fait un froid de canard !

Heureusement, Yvonne vient me voir tous les soirs. Elle m’accompagne vers mon sommeil. Je lui ai bien proposé un morceau de bûche mais elle ne l’a même pas regardé. Elle s’est contentée de faire ce qu’elle fait le mieux : plonger son regard dans le mien et me sourire. Elle change de robe tous les soirs. De coiffure aussi. De bijoux. J’aimerais tant qu’elle chante pour moi mais qui suis-je, misérable vermisseau, pour avoir droit à cet honneur ?

 

Jour foie gras

C’est le nouvel an ce soir mais c’est pas la fête. Julie est venue hier en pleurs, blanche comme un linge, accompagnée de tonnes de victuailles. « Les Allemands vont venir s’installer ici, Monsieur Léon ! Un commandant veut faire du Gavroche son quartier général. On doit toutes déguerpir le premier janvier ! Vous vous rendez compte, Monsieur Léon ? Le premier janvier ! Madame Rosie a fait un tel scandale qu’ils l’ont embarquée ! Nous sommes perdues Monsieur Léon, perdues ! ». Elle avait pleuré longtemps et, étrangement, je l’avais réconfortée du mieux que je pouvais. « J’ai un frère dans la Résistance, je lui dirai que vous êtes là. Ne vous en faites pas, Monsieur Léon, ils vous sortiront de là, pouvez en être sûr. Je vous ai apporté tout ce que je pouvais comme nourriture. Tenez le coup, Monsieur Léon, ça sera pas long ! ».

 

Jour ?

Il y a belle lurette que la petite Julie est partie et que les réserves de bouffe sont épuisées. La Résistance n’est toujours pas venu mais peu m’importe. Avec Yvonne, on passe du bon temps ensemble. Elle aime que je l’admire pendant des heures et elle sait que j’aime la regarder. J’ai depuis longtemps abandonné l’idée d’avoir la moindre relation charnelle avec elle. Ce serait même indécent de ma part. J’ai bien essayé de l’embrasser une fois mais elle s’est dérobée et n’est pas réapparue pendant ce qui m’a semblé des lustres. Elle veut que je la respecte et que je l’aime pour ce qu’elle est. C’est décidé. Je veux finir ma vie avec elle.

 

Jour ??

Il me reste juste une bougie. Je vais l’économiser le plus possible pour écrire. Yvonne sait que je n’aurai bientôt plus de lumière et maintenant elle m’apparaît entourée d’un halo lumineux. Je n’ai pas mangé depuis bien longtemps mais, étrangement, je n’ai pas faim. Je me sens faible, je l’avoue, mais la présence d’Yvonne me donne la force nécessaire pour continuer de vivre. Vivre d’amour et d’eau fraîche. Ça marche ! Mais pour combien de temps ?

 

Jour ???

Je suis dans ses bras. Sa splendeur m’éclaire pendant que j’écris ces quelques mots. Mon oreille collée à sa poitrine, je sens son cœur battre lentement, à intervalles réguliers. Elle me fredonne une comptine que me chantait ma grand-mère quand j’étais petit. C’est beau. Je sens la vie s’écouler de tous mes pores, comme une baudruche qui se dégonfle lentement. Je n’ai pas froid. Son étreinte me réchauffe.

Je suis bien.

 

Ou en PDF http://www.phenixweb.info/sites/default/files/Le-bruit-des-bottes-Christ...

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