Caravane de l'étrange (La)


Une production de HBO, cette série – ovni télévisuel comme souvent chez HBO après des séries comme Six Feet Under, Les Soprano ou le récent Trône de fer – a révolutionné le petit écran lors de sa sortie.

S’inspirant pour la photographie comme pour le surréaliste du travail d’un David Lynch (d’ailleurs la série fait beaucoup penser aussi à Twin Peaks, par ses côtés Bien/Mal, ses personnages décalés et les situations qu’on doit accepter sans avoir d’explication, une sorte de mythologie imperméable), il s’agit d’une allégorie du combat du Bien contre le Mal.


Hélas, Carnivàle en VO, projet sur 6 saisons, fut annulé après deux saisons, malgré les 50.000 mails de contestation reçus par le président de la chaîne. Daniel Knauf, son créateur, nous narre la vie d’un cirque itinérant. Riche de personnages tous plus bizarres et flirtant avec les « Freaks » (monstres en anglais, telle la femme à barbe, l’homme-serpent etc.), nourri de références historiques à la période des tempêtes de poussière en Oklahoma dans les années 1930, La caravane de l’étrange est une sorte de voyage initiatique.

Ben Hawkins est hébergé par un cirque itinérant après le décès de sa mère et son évasion des prisons de la police. Désemparé, ce jeune homme faisait peur à sa propre génitrice bigote à cause de ses pouvoirs de guérison et de résurrection.

Petit à petit, avec ses nouveaux amis, il se voit être envahi par des rêves du Bien et du Mal, rêves qu’il partage à l’identique en mode « miroir » avec un prêcheur/arnaqueur, Justin Crowe (Clancy Brown, excellentissime). Qui est le Bien, qui est le Mal ? Qui va provoquer l’autre ?
Nick Stahl joue Ben et parmi la grande équipe, on retrouve le Belge Patrick Bauchau (Le caméléon) dans le rôle du professeur Lodz et Michael J. Anderson (1m09 et déjà présent dans le film Twin Peaks) dans celui du directeur du cirque, le nain Sanson, celui qui guidera partiellement Ben, non sans un peu le manipuler.

Série envoutante, exigeante, esthétique, construite et lente mais en fait si ces qualificatifs sont bien choisis, c’est qu’ils illustrent le rythme donné par le cheminement de cette étrange caravane dont chacun des membres est un monstre physiquement et un être plein d’humanité pour qui ne s’arrête pas aux apparences. À l’image du générique, limite psychédélique, le décor est planté au milieu du sable qui vole, d’une musique lancinante. Rien n’y est laissé au hasard, certains détails se révèlent essentiels, comme construits en boucle narrative.


La série va crescendo, la saison deux étant beaucoup plus rapide que la première et nous faisant regretter une annulation arbitraire. Ce n’est pas une série de tout repos : elle est exigeante, elle demande à être apprivoisée, suivie et aimée telle qu’elle est. Elle est addictive quand vous avez enfin percé sa carapace et accepté ses différences. Elle ne laisse personne indifférent, du méga fan à celui qui n’a pas réussi à entrer dans l’ambiance.

Son esthétique est à rapprocher d’un film culte le Bagdad Café, qui partage avec lui le décor de désert, de vent, une lenteur léchée et la présence de personnages hors normes.

« Ce n’est pas du fantastique, ce n’est pas du documentaire, ce n’est pas uniquement historique et ce n’est pas une fiction de mœurs. C’est tout à la fois » nous résume Pierre Sérisier sur le site du Monde, section Blog des Séries. C’est probablement à la fois clair et complexe et la raison qui a fait courir à sa perte une des séries les plus inclassables des dernières années.

La caravane de l’étrange (Carnivàle)

créée par Daniel Knauf

2003

24 épisodes, 2 saisons

avec Nick Stahl, Clancy Brown, Amy Madigan, Michael J. Anderson,

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