John Mac Tiernan

Réalisateur: 


Parlons un peu de cet enfant terrible qu’est John Mac Tiernan.

Car si l’on peut parler de son sens inné de la prise en main d’un film, là, on est en plein dedans.

Son premier film, qui n’a marqué l’esprit de personne, n’est pourtant pas dénué d’intérêt. Loin s’en faut.

Nomads. Un téléfilm dans lequel Pierce Brosnan est aux prises avec une bande venue de nulle part. Où est-ce nulle part ?

Ben, nulle part, fada. (Je sais, je suis parti pendant l’été dans le Sud, forcément, ça laisse des traces.)

Peu après ce film prometteur, Mac Tiernan erre dans les couloirs tortueux d’Hollywood. Il recherche un scénario qui laisserait libre cours à son imagination.

Les deux frères Thomas ont un projet avec une créature E.T.


Marre d’avoir depuis un bon moment des E.T sympatoches qui débarquent sur notre vieille planète et ne pensent qu’à peace and love.

Et maintenant, pourquoi ne pas faire un E.T aussi belliqueux que nous. (Ça ne va pas être de la tarte d’en trouver un).

Donc, les deux frères imaginent un E.T chasseur. Face à lui, un commando de bérets verts dirigé par Schwarzie en personne.

Vu comme cela, le scénario paraît simpliste, mais il s’agit bel et bien de Predator.

Joël Silver, producteur qu’il n’est plus la peine de présenter … Si ? Bon d’accord.

Producteur de quelques petits films à succès. Tétralogie L’Arme fatale, Qui veut la peau de Roger Rabbit (et non Qui veut la bite de Roger Lapeau). Ce n’est pas dans le même rayon. Au fond, à droite, derrière la tenture noire. Enfin, vous connaissez peut-être mieux que moi.


Joël Silver, donc, investit un paquet de dollars en pressentant un succès au box-office.
Manquait plus que le réalisateur, celui qui insufflerait la vie à cette idée.

Comme je disais plus haut, notre Tiernan errait dans les couloirs d’Hollywood.

Et v’la ti pas qu’il tombe sur la plantureuse secrétaire de Silver qui photocopie une masse de pages.

- Mais qu’est-ce donc ? lui demande-t-il en plongeant son regard sur son décolleté ravageur.

- Hi hi hi. Un scénario de SF.

Et là, Mac Tiernan arrache sa robe comme une bête et l’entreprend à même la photocopieuse …

Mais qu’est-ce que je raconte !

Je réajuste ma cravate et je reprends.

Mac Tiernan demande un exemplaire et s’en va le lire.

Il le tient enfin son scénario. Derechef, il rencontre Silver et le convainc de l’engager lui et pas un autre.

Après quelques déboires, surtout sur le site du tournage au beau milieu du Mexique en pleine chaleur étouffante ou encore les esquisses ridicules des maquilleurs pour présenter un predator digne de ce nom, le film est distribué sur les écrans.

Mac Tiernan réussit là où peu de réalisateurs sont parvenus.

Faire d’une créature de cauchemars, et qui plus est, un E.T, un héros. Un personnage central et presque attachant malgré qu’il ne soit qu’un monstre sanguinaire.

Seul Ridley Scott avec Alien était parvenu à un tel résultat. Car, il faut l’avouer, les spectateurs se déplacent pour Alien et ce qu’il représente.

Idem pour Predator, nous nous sommes rendus dans les salles obscures pour le deux afin de voir la créature péter la tronche à tous ceux qui portent une arme.

Car, notons-le, Predator est un chasseur réglo. Il ne chasse que les personnes armées.

Ce Predator connaît un succès retentissant et par la même occasion fait sortir Schwarzie de son carcan de Terminator et des « I’ll be back » à tout bout de champ.

On ajoute à cette réalisation musclée, une bande originale du tonnerre. Pour ceux qui aiment le philharmonique, la composition de Alan Silvestri sur Predator est certainement celle que je retiendrais le plus.

Notre réalisateur s’intéresse de près à un remake de La Tour Infernale. Comme il a fait entrer des dollars dans la poche des producteurs, la confiance est là. (Quel hasard quand même !)

La tour Nakatomi, futur siège de Sony, est en pleine construction. Évidemment, c’était trop tentant.

_ Une tour en travaux, un Mac Tiernan débordant d’idées et un acteur tout droit sorti d’une série intitulée « Clair de lune ».

Bruce Willis, alias l’inspecteur Mac Lane et son fameux « Yi pi kaï » est né.

Ce colossal succès planétaire aura trois suites. 58 minutes pour vivre de Renny Harlin … Oui bon.

Une journée en enfer. Nettement mieux et qui est derrière la caméra ? Je vous le donne en 152 (C’est 1000 en euros, ndlr : conversion en francs !). Mac Tiernan en personne. Eh oui, après le flop financier de Last Action Hero, il faut remplir les caisses.

Et enfin, le dernier opus de la saga :

Meurt pas aujourd’hui on a besoin de toi ou meurt maintenant, on s’en branle, enfin, un titre dans ce goût-là.

Produit en partie par Tiernan. Pas folle la guêpe, il sait que cela va ramasser un paquet de thunes.

Je ne suis pas expert en armes, mais ce qui est tout de même surprenant est que les tireurs d’élite (les badguys) ont des fusils de haute précision et ils ratent comme des grosses truffes notre bon vieux Mac Lane. Et lui, avec son Beretta, les méchants tombent comme des mouches. À mains levées s’il vous plaît et sans jamais avoir le canon de son arme brûlant ?

Et c’est par là même que l’on peut constater le talent de Mac Tiernan.

Alors que dans les opus 1 et 3 de Die Hard, les scènes d’actions sont rocambolesques, Tiernan filme ceci à merveille, nous faisant avaler la pilule sans rechigner. Bien sûr, en deuxième ou troisième visionnage, l’on n’est plus dupe.

Par contre, les opus 2 et 4 ne sont pas filmés sous les mêmes auspices (s’il continue à faire des suites comme ça, c’est hospice qu’il faudra dire). Du coup, on y croit pas du tout et on aurait tendance à sourire un peu. Si, si, j’en vois un ou deux qui sourient.

Un commandant de sous-marin soviétique veut gagner l’occident. Comme faire pour s’approcher des USA quand on est l’ennemi juré et que l’on a en sa possession un arsenal nucléaire flottant ?


D’un côté, les Ricains ne vous laisseront pas approcher de leurs côtes. De l’autre, la marine russe fera tout ce qui est nécessaire pour envoyer par le fond avant que vous puissiez livrer votre sous-marin.

À la poursuite d’octobre rouge est le film suivant de Tiernan. Sean Connery en commandant russe et Alec Baldwin dans le rôle de Jack Ryan. Sorti tout droit du cerveau de l’auteur Tom Clancy. Excellent film au suspense étouffant qui fera succès aux States. L’accueil sera plus froid en Europe. Le héros Jack Ryan était né et l’on en fera une vraie saga. Alec Baldwin sera remplacé par Harrison Ford. Danger immédiat, Ryan à la mer, Ryan en colonie et bientôt Ryan en gériatrie.

Trois films de Tiernan et trois films générant des suites. Sa réputation n’est plus à faire.
Avec Medecine Man, il prend ses fans à contre-pied. Ils attendaient un film d’action et c’est une fable écologique se déroulant au beau milieu de forêt amazonienne. Sean Connery est de nouveau sous la direction de Tiernan.

Superbes images qu’il nous offre là.

Un garçon sèche l’école pour aller voir son héros favori au cinéma. Un tour de magie et le voilà projeté au côté de son héros, dans le film même.

Schwarzie s’auto parodiant dans ce Last Action Hero. Le film se fait littéralement laminer au box-office. Un concurrent sérieux ne laisse aucune miette. Steven Spielberg et son Parc Jurassique. Que voulez-vous, il y a certaines choses contre lesquelles on ne peut lutter.


Et pourtant Last Action Hero est loin d’être un navet. On est un peu dans l’humour du trio Zucker/Abraham/Zucker où l’on doit tout écouter tout regarder.

Le film regorge de scènes croustillantes et Schwarzie dévoile qu’il a de l’humour.
Anthony Quin est de la partie et nous gratifie d’un rôle de parrain à la hauteur de son talent.

Après cela, Tiernan s’est un peu enlisé dans une certaine monotonie. Du coup et, bien évidemment, ses films sont moins bons et le public boude un peu.

Seul, le Treizième guerrier sort son épingle du jeu. Grâce surtout à Antonio Banderas qui nous enchante dans son rôle de guerrier arabe perdu au beau milieu d’une bande de brutes vikings.

Le choc des cultures est très intéressant à suivre.

Le tournage sera malheureusement entaché par la mésentente entre Tiernan et Michael Crichton, auteur du livre et producteur du film. Tiernan aurait quitté le plateau avant la fin du tournage et l’on attribuera la réalisation finale à Michael Crichton.

Il faut dire que l’idée de filmer sans projecteur, juste à l’aide des torches utilisées par les acteurs, n’était pas brillante. À certains moments, on a de la difficulté à suivre les scènes, faute d’éclairage suffisant.

Le remake de L’Affaire Thomas Crown enlise un peu plus Tiernan. S’attaquer à
des remakes, c’est déjà limite, mais si en plus l’original était d’un très haut niveau, vous êtes voué à un plantage en bonne et due forme. Dans ce cas-là, seule la nouvelle technologie des effets visuels peut vous sauver. En exemple, je prends La Guerre des Mondes de Spielberg. Sans les nouveaux effets spéciaux, il n’aurait rien pu ajouter à l’original. Tout était dit.

Dans le cas de Thomas Crown, pas d’effets. De bons acteurs difficiles à égaler. Donc, Tiernan n’a pas su attirer la foule.

À ces déboires s’ajoute une affaire d’écoutes téléphoniques et le voila devant la justice.

Il récidive dans le remake d’un film où il ne pouvait rien apporter de bien nouveau comparativement à l’original.

Rollerball. Je me suis longtemps demandé qu’avait dans la tête Tiernan pour nous pondre ce film qui ne vaut rien. Même Jean Reno, pourtant excellent dans bien d’autre registre n’y croit pas. Tiernan n’a été que l’ombre de lui-même.

Les producteurs japonais lui auraient mis une énorme pression sur les épaules. Piètre excuse si l’on peut en appeler cela une.

Et quand la chance ne sourit plus, elle ne sourit plus.

Il réalise l’excellent Basic. L’enquête sur un meurtre au beau milieu de l’armée.

Seulement, la guerre en Irak commence et le public n’a pas envie de voir des soldats. Il en verra bien assez aux infos.

Basic, pourtant, n’est pas un film de guerre au sens propre, mais il se plantera au box-office.


Ses projets le remettraient-ils sur les rails ?

Difficile à dire. Dans ce fatras d’idées, il y en a une des plus intéressantes. Mais, j’ai bien peur qu’elle ne fonctionne pas sur le public.

Le fils d’un terroriste, tué par le FBI, infiltre l’agence et se venge sur toute l’équipe qui a abattu son père.

Scénario original, mais dans le contexte international, ce sera très difficile à faire passer la pilule.

On croise les doigts pour lui et l’on espère, qu’il nous reviendra un jour avec un film à couper le souffle, comme il sait si bien les faire. En attendant, je me visionne Predator pour la énième fois.

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Commentaires

Cette bio n’est même pas digne du magazine Première. Passé l’humour potache plus qu’horripilant, il n’y a rien sur ce qui est certainement un des plus grands réalisateurs américains des 15 dernières années. De plus, notre critique en herbe n’a même pas de regard, car il ne sait déceler, dans la scène de bataille nocturne du 13ème guerrier, un parti prix de réalisation radical. Si l’on a des yeux pour voir et un cerveau pour émettre un point de vue, on se rend compte que ce parti pris suit la prise de conscience progressive du héros joué par Banderas. S’il on se donne à bien regarder toutes les scènes de combat du film, on voit qu’elles procèdent toutes d’un dispositif différent, tant au niveau du cadrage que de la lumière et qu’au fur et à mesure du film elles deviennent de plus en plus lisibles. C’est que John Mc Tiernan lui, sait exprimer un point de vue et ici c’est celui du personnage de Banderas qu’il a choisi de rendre. Il est très clair que ce personnage est pendant tout le film dans la position de l’apprenti et que nous avons à faire, au niveau de la narration, a une structure en forme de rite initiatique. Donc, pour la faire courte, lorsque l’on apprend au commencement on ne voit pas, on subit (cf les premiers combats), puis de l’initiation naît la conscience et notre regard se délie (cf la dernière scène entièrement filmée au ralenti). Toutes les scènes de combat dans le film rendent progressivement compte de cette évolution du personnage principal. La force de Mc Tiernan est de l’avoir fait passer uniquement par le visuel. Je vous conseille donc, cher critique en herbe, de revoir le film, car par votre regard ainsi renouvelé vous ne pourrez écrire comme auparavant, sûr que sous vos yeux vous avez certainement un des plus grand film sur le mythe du héros des 20 dernières années ( ou alors, sinon, allez écrire dans la rubrique "critique des spectateurs" sur allo-ciné).
TT