Je suis une légende

3 ans plus tard

 

Le survivant

Comme le dit si bien l’adage : “L’Enfer est pavé de bonnes intentions”. En effet, l’objectif de départ d’un groupe de scientifiques était des plus louables, à savoir, mettre au point un rétrovirus capable d’éradiquer le cancer. Les premiers résultats furent d’ailleurs très prometteurs puisque les malades traités guérirent tous du cancer, sans exception mais développèrent, dans un deuxième temps, des effets secondaires bien plus catastrophiques car le rétrovirus muta ensuite sans qu’on sache pourquoi et, en 2009, une terrible pandémie ravagea alors la planète toute entière.

Trois ans plus tard, Robert Neville, armé jusqu’aux dents, arpente les rues dévastées de Manhattan avec pour unique compagnon, son fidèle chien, Sam. Mystérieusement immunisé contre le fléau, Neville est désormais le seul habitant de New York et il se pourrait bien qu’il soit aussi le dernier être humain encore en vie sur terre. En effet, depuis trois ans déjà, il diffuse chaque jour des messages radio sur la bande FM dans le fol espoir de trouver quelque part d’autres survivants et, à ce jour, nul n’a encore répondu à ce vibrant appel mais ce n’est pas pour autant qu’il soit “seul” puisque des mutants victimes du rétrovirus, qu’on a surnommé les “infectés”, rôdent dans les ténèbres en observant ses moindres déplacements et en attendant patiemment qu’il commette une erreur fatale.

 

La double vie de Robert Neville

Avant la catastrophe, Neville était, à la fois, un militaire chevronné et un brillant scientifique de réputation mondiale. Il s’est écoulé trois ans depuis l’évacuation de New York et la mise en quarantaine des malades à Manhattan mais ceux-ci sont morts depuis longtemps ou se sont transformés en infectés. Neville a fini par s’organiser tant bien que mal. Il a transformé sa maison en camp retranché en renforçant toutes les portes et fenêtres par des plaques blindées qu’il ferme soigneusement dès la nuit tombée mais aussi en installant des charges explosives ainsi qu’un réseau de caméras vidéo tout autour de sa demeure. Tous les matins, il s’accorde quelques heures de sommeil et s’astreint ensuite à une rigoureuse séance de gymnastique puis il sort avec Sam et va transmettre à midi pile son message à la radio. Il passe une partie de son après-midi à récolter toutes sortes de choses qui lui sont utiles (conserves, eau, essence, armes et munitions, matériel médical, etc) ou à chasser des animaux sauvages qui errent maintenant en liberté dans la ville. Il prend même le temps de s’octroyer quelques petits plaisirs comme de rouler à tombeau ouvert dans les rues désertes, de jouer au golf dans des endroits particulièrement saugrenus ou encore se rendre au vidéo club du coin afin de renouveler son stock de DVD. Quoiqu’il fasse, il doit toujours impérativement rester sur ses gardes et il est également tributaire de la lumière du jour qui tient à l’écart les infectés. En effet, pour lui se retrouver à l’extérieur dès que la nuit tombe ou accidentellement piégé dans un local non éclairé équivaut à signer son arrêt de mort.

La nuit venue, il se barricade chez lui et observe de loin, grâce à ses caméras, les allées et venues des infectés qui déambulent dans les rues désertes en quête de chair fraîche. Il passe ensuite de longues heures dans sa cave qu’il a aménagée en laboratoire où il fait des expériences scientifiques afin de trouver un remède capable d’inverser les effets du rétrovirus. A cet effet, il a infecté toute une colonie de rats sur lesquels il teste différentes formules de vaccin. Lorsqu’un jour il finit enfin par obtenir un résultat prometteur, il prend alors le risque de capturer une infectée pour vérifier si son nouveau vaccin est aussi efficace sur les rats que sur les infectés. Pour la 1ère fois en trois ans, il semble proche du but mais faudrait-il encore que ses nombreux poursuivants lui laissent le temps de peaufiner ses recherches.

Déjà traumatisé par la perte de sa femme et de sa fille qu’il a vu mourir accidentellement sous ses yeux lors de l’évacuation de New York sans rien pouvoir faire, Neville est un homme meurtri qui souffre de la solitude. Il se sent en partie responsable de la propagation de l’épidémie et culpabilise de n’avoir pas su trouver un remède efficace pendant qu’il en était encore temps. Tel le Dr Jekyll et Mr Hyde, il est déchiré entre son côté “scientifique”, qui fait tout ce qu’il peut pour trouver un remède qui pourrait inverser le processus et donc guérir les infectés en leur rendant leur humanité, et son côté “militaire” qui le contraint sans cesse à devoir tuer des infectés pour sauver sa peau afin de pouvoir justement continuer ses recherches.

Le train-train quotidien de Neville change radicalement lorsqu’un de ses messages finit enfin par être capté par deux autres survivants : Anna et le jeune Ethan dont l’arrivée impromptue lui évitera de justesse de tomber aux mains des infectés. Après avoir passé trois longues et interminables années à multiplier les efforts pour tenter de joindre d’hypothétiques survivants, Neville a fini par s’habituer à sa solitude alors lorsqu’il est rejoint par Anna et Ethan, il est partagé entre le désir de contact humain et la peur de tomber dans un piège. Au début, il se demande d’ailleurs s’ils sont, bel et bien, réels ou s’il ne serait pas tout simplement victime d’hallucinations. Anna est persuadée que tout ce qui est arrivé était la volonté de Dieu et qu’il existe une colonie de survivants qui s’est installée dans les montagnes. Neville ne partage pas son avis mais elle a bien l’intention de tenter sa chance pour aller les rejoindre.

Aux frontières de l’aube

Lorsque la pandémie frappe de plein fouet, elle décime très rapidement 90% de la population mondiale. Parmi les 10% encore en vie, seul 1% est naturellement immunisé contre le rétrovirus sans qu’on sache ni pourquoi, ni comment, tandis que les autres 9% sont victimes d’une terrible mutation de leur métabolisme qui les transforme en hideuses créatures condamnées à errer dans les souterrains de la ville dont ils ne sortent qu’à la nuit tombée afin de satisfaire leur monstrueux appétit de chair humaine ce qui les a, d’ailleurs, poussé à massacrer les rares chanceux qui n’avaient pas encore été contaminés.

Les infectés sont toujours des “humains” mais des humains qui ont, en quelque sorte, régressé à un état de sauvagerie primaire et à une forme de cannibalisme. Leur contamination par le rétrovirus a singulièrement modifié leur apparence et leur métabolisme. Ils ont désormais un comportement survolté et un rythme cardiaque plus rapide que la normale. Ils sont capables d’accomplir de véritables prouesses physiques : ils courent plus vite, sautent plus haut et n’ont aucune réaction lorsqu’ils heurtent un obstacle de plein fouet. Ils souffrent aussi constamment de fortes fièvres. Ils doivent impérativement fuir la lumière du jour car elle leur brûle la peau, ils sont alors secoués par de violentes convulsions, leur peau se met à fumer et ils meurent dans les minutes qui suivent. C’est pourquoi, ils se cachent dans les recoins les plus sombres de la ville pendant le jour et se déplacent en bandes dans les rues désertes dès la nuit tombée en quête de chair fraîche. Malgré tous les profonds bouleversements qu’a subis leur métabolisme, ils n’en restent pas moins des êtres qui ressentent des émotions, la preuve étant leur acharnement contre Neville qu’ils considèrent désormais comme un “tortionnaire” depuis qu’il a capturé l’une des leurs afin de tester sur elle le remède qui vient de montrer son efficacité sur l’un des rats de laboratoire.

Pour montrer à l’écran ces infectés, on a d’abord fait appel à de vrais comédiens qui ont interprété leur rôle au naturel lors du tournage. Pendant la pré-production, la création du design des infectés ainsi que la réalisation de leurs maquettes en volume ont été confiées à Patrick Tatopoulos. Les maquettes ont ensuite été scannées pour créer les images de synthèse des personnages. Les équipes de Sony Imageworks ont ensuite associé infographie et motion capture pour obtenir et animer à la main ces créatures, à la peau glabre et translucide, auxquelles ils ont rajouté ensuite d’autres caractéristiques spécifiques comme la pulsation du sang dans leurs veines, l’exagération de l’ampleur de leur respiration, la dilatation de leurs narines ou encore les muscles de leurs mâchoires. Ils se sont également occupés de l’animation des multiples animaux sauvages qu’on voit dans le film (les cerfs et les biches, la lionne et son lionceau, les chiens mutants ainsi que les rats de labo contaminés).

New York 2012

L’élément le plus marquant de cette nouvelle adaptation du roman de Matheson est incontestablement le New York de 2012 (qui fait, en quelque sorte, écho au Londres de 28 Jours Plus Tard). Il s’est écoulé trois ans depuis le début de la pandémie et dans les rues désertes de la ville, où les scènes de pillage ont laissé des traces, la nature n’a pas tardé à reprendre ses droits et les animaux sauvages en ont fait leur terrain de chasse.

La majeure partie du film a été tournée à Manhattan en pleine journée en bloquant les rues sur plusieurs pâtés de maison, après avoir maquillé les façades des immeubles et les trottoirs, installé des carcasses de voitures en travers de la chaussée, déversé des tonnes de boue et mis en place toutes sortes de mauvaises herbes. Chaque plan a, ensuite, été savamment retouché par ordinateur pour en effacer tous les signes de vie (piétons au loin, feux de circulation, éclairage dans les bureaux et sur les façades des buildings, enseignes des magasins, publicités lumineuses, etc).

Pour la scène de Time Square, on a créé un décor de hautes herbes devant un fond bleu en studio auquel on a rajouté quelques carcasses de voitures au 1er plan. Pour le décor qui se trouve à l’arrière, on a pris toutes sortes de photos haute définition de Time Square, fait de nombreux relevés télémétriques de l’endroit et recréé les volumes des immeubles en 3D avant de leur appliquer par-dessus les photos des façades puis on y a effacé tout ce qui n’avait pas lieu d’être (éclairages dans les rues, enseignes au néon, publicités, etc). On a ensuite vieilli le tout, rajouté de la poussière aux fenêtres, salis et déchirés les auvents des boutiques afin de renforcer l’idée qu’il s’était écoulé 3 ans. On a également créé des revêtements de route fendillés et craquelés avec les herbes folles qui ont poussé dans les interstices.

Seul au monde

Cette 3ème adaptation cinématographique de Je Suis Une Légende revisite le classique de SF pour en donner ici une version plus contemporaine. Exit donc les vampires du roman originel pour les remplacer par un autre Mal plus en adéquation avec nos peurs actuelles. Si, en 1954, la guerre bactériologique relevait en pleine guerre froide quasiment du “fantastique” pur, envisager de nos jours une pandémie liée à un rétrovirus mis en circulation par l’homme est des plus crédibles si on considère que les épidémies isolées de type ébola, “vache folle” ou autre grippe aviaire de ces dernières années auraient très bien pu dégénérer sans compter les diverses armes chimiques et bactériologiques qu’il serait relativement facile de propager très rapidement (du genre l’attentat avec du gaz sarin qui a eu lieu dans le métro à Tokyo).

L’intrigue ne résume heureusement pas à un simple film catastrophe mais mélange harmonieusement différents genres (SF, horreur, action, drame) et s’attarde surtout sur le parcours émotionnel de cet homme qui a tout perdu (non seulement les proches qu’il aimait mais aussi le monde tel qu’il le connaissait jusqu’alors) et se retrouve être le seul survivant dans une ville déserte (et peut-être même dans le monde tout entier), envahie par les herbes folles où règnent le chaos et la désolation, tout en se sentant aussi en partie responsable de la terrible catastrophe ayant engendré la quasi-extinction de la race humaine. Le spectateur partage donc ses peurs, ses rares joies, ses larmes, sa frustration, ses espoirs ainsi que son combat quotidien pour rester en vie et ne pas sombrer dans la folie. Ce survival urbain, qui cultive l’hyperréalisme grâce à des décors très impressionnants et de nombreux effets spéciaux en tous genres, est aussi une réflexion sur la condition humaine et les dérives scientifiques. Malgré quelques regrettables invraisemblances scénaristiques, Will Smith porte avec brio le film à bout de bras.

Je Suis Une Légende

Réalisation : Francis Lawrence
Avec : Will Smith, Alice Braga, Dash Mihok, Charlie Tahan, Salli Richardson.
Sortie le 19 décembre 2007
Durée : 1h 40

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Commentaires

Hum ! Ca m’a l’air bien tout ça. Je pense que c’est un peu plus porté sur l’action que la réflexion, comme "I robot" ? Ce qui ne me dérange pas, puisque j’ai beaucoup aimé la dernière version cinéma du chef d’oeuvre d’Asimov.

Gérard

C’est remoi. Bon film, en effet. Je viens de le voir, hier soir, au ciné. d’ailleurs, c’est au ciné qu’il faut le mater si on veut profiter des grands espaces new yorkais. La rythmique action/réflexion est bien menée. Will Smith campe un personnage à la limite de sombrer dans la folie, borné à trouver l’antivirus qui sauvera le monde, car il se sent investi d’une mission pour les humains. Après, les sujets de fond ne sont pas vraiment approfondi. Ce qui n’est pas si mal, puisque ça laisse à chacun sa réflexion. La fin change d’habitude. Sinon, y’avait la bande annonce de "John Rambo" juste avant le film. Euh... Un rambo sexagénaire, ça se voit méga trop sur grand écran. Sinon, ben, y’a du Birman a tué, parce que y’a du ricains à sauver ^^