Locas et Palomare City
Nous sommes au coeur des années 80. La vague punk fait rage. Dans le monde du comics, c’est la crise. Les super-héros s’ennuient parce qu’ils ont arrêté tous les super vilains. Lorsque l’un d’eux s’échappe, c’est l’occas’ de faire son come back auprès des médias. Mais l’euphorie passe vite une fois le malfrat sous les verrous. Dans le monde du Mal ou plutôt... du Mâle, il reste Costigan, une sorte de Lex Luthor qui a raflé toute la mise. Y’a plus de grands lobbies à part lui. Il posséde tout. Du coup, il se méfie de tous et s’enferme dans une grande villa à sa demesure. Des centaines de pièces dans lesquelles sa dernière conquête dilapide sa fortune en construisant des décors hollywoodiens. Reflet de ces grosses fortunes qui ont besoin de tout contrôler, Costigan et sa girl ne sortent plus et organisent des soirées Jet Set, histoire de se donner un semblant d’humanité. Résultat, super-héros et milliardaires ne passionnent plus.
C’est plutôt du côté des Locas qu’il faut jeter un oeil. Maggie et Hopey sont des Locas. On les appelle ainsi, car ce sont des filles de 16 ans qui s’habillent comme les mecs, qui jurent, qui crachent, qui se coiffent avec de la bombe de peinture et qui taguent les murs. Elles habitent les quartiers latinos de Satelitte City. Leurs copines sont toutes déjantées. Normal, elles se droguent, elles boient ou jouent du punk-rock. En plus de ça, Maggie et Hopey sont lesbiennes, plus exactement, elles sont bi. De quoi énerver les machos qui peuplent le quartier et ces "putains de flics" qui fonctionnent comme des nazis. Pendant ce temps, de l’autre côté de la frontière, le Mexique flirte avec l’Amérique des années 50. Les grosses caisses à la James Dean, les films de Marlon Brando et les nanas qui s’habillent à la Marylin Monroe. Loin des grandes villes, on ne sait même pas que Bruce Lee est mort ! Bienvenue à Palomare City, une bourgade perdue au milieu du désert, où les fantômes partagent le quotidien des vivants et où les femmes sont des héros. Mais pourquoi des héros ? Parce qu’elles soignent le coeur des Hommes et parfois un peu plus bas ? Parce qu’elles n’ont pas leur langue dans leur poche ? Ou parce qu’elles sont des femmes modernes capables de s’assumer seules ? A vous de voir !
"Locas" et "Palomare City" sont trois recueils de la série de comics "Love and rockets" parue dans les années 80. A une époque où le comic book voyait ses ventes chuter, des gars comme Alan Moore ou Frank Miller ont osé faire descendre de leur piedestal tous ces jolis messieurs en bas moulants. C’est ainsi que sont apparus les excellents "Sin City" et "Watchmen". Ce que l’on sait moins, c’est que d’autres scénaristes ont marqué les comics de cette époque. Entre autres, les frères Gilbert et Jaime Hernandez. Ces purs enfants du Mexique on choisi de parler de leur Amérique, celle des quartiers latinos, des guerres de gangs, de la génération punk grandissante. Les super-héros en latex ne sont jamais très loin, ni les grands malfrats, mais ils servent surtout de toile de fond. Ce qui intéresse les frères Hernandez, c’est le quotidien de cette nouvelle génération de femmes qui émergent à la fois aux USA et au Mexique. Empruntant beaucoup à leur enfance, ils nous présentent des jeunes en décalage avec leur âge et leur époque. Par exemple, Hopey et Maggie, les deux punkettes, vivent ensemble. Elles doivent s’assumer seules. Elles bossent déjà et se confrontent à des adultes déroutés ou malsains. De leur côté, les toutes jeunettes Pipo et Carmen de Palomare sont de véritables garçons manqués. Normal pour ces gamines dont les papas sautent sur tout ce qui bouge. "Locas" et "Palomare City" riment aussi avec humour. Quand on a 16 ans, on est du genre à faire les 400 coups, autrement dit on trouve toujours le moyen de se faire courser par les flics ou par le shérif. Ce qui entraîne des situations plutôt rocambolesques.
Il y a aussi les déboires sentimentaux de nos belles héroines. Confrontées à tous ces mecs qui ne pensent qu’avec leur calbute, Maggie, Carmen et les autres finissent par se poser des milliards de questions existentielles. Puis elles tapent leurs crises, prennent du poids, deviennent anorexiques, etc, etc. Sur plus de 900 pages, vous suivrez ainsi les aventures délirantes de ces "Desesperates Housewives" des années 80.
Titre : Locas et Palomare City
Scénario et dessins : HERNANDEZ Jaime et Gilbert
Editeur : Seuil
Parution : 2006
Nombre de pages : 3 volumes d’environ 300 pages