Goal of the Dead

Gore is not dead

Le problème du cinéma d’horreur est qu’il n’y a plus de bons films d’horreur. Les Américains bégayent à coups de remakes, les Japonais tournent en rond avec leurs histoires de fantômes aux cheveux longs et les Espagnols sont allés se recoucher après la vague horrifique jadis brillamment menée par Jaume Balaguero. Quant aux Français, c’est simple, ils n’ont jamais su en réaliser sauf quand ils sont allés tourner aux USA.

On imagine donc les difficultés rencontrées par les frères Rocher et leur société Capture the Flag pour monter un projet comme GOTD (Goal of the Dead). D’autant plus qu’ils ne se sont pas facilité la tâche en optant pour la créativité et l’originalité. Quitte à présenter le film sous forme de diptyque à la manière des films d’exploitation et à l’instar du fameux « Grindhouse » réalisé par la dream team Tarantino/Rodiguez.

 

Le résultat ici est saisissant.

 

Précisons tout de suite que le film est techniquement parfait. Il est important de le souligner car le cinéma d’horreur bleu blanc rouge est souvent frappé d’une pellicule crade, de cadrages parkinsoniens, d’un scénario rachitique, d’une musique de bourrins et d’acteurs amateurs post pubères en roue libre. Bravo donc au chef opérateur Mathias Boucard, aux deux réalisateurs Benjamin Rocher et Thierry Poiraud, aux six scénaristes, aux deux compositeurs dont j’écoute la superbe BO en boucle et en écrivant cet article. Bravo aussi à l’interprétation.

Sur ce dernier point, GOTD sonne juste ! Des acteurs principaux aux secondaires, ils sont crédibles et dans le ton. Alban Lenoir, tout en introversion sur la silhouette d’athlète qu’il s’est façonnée pour la circonstance, est touchant. Tiphaine Daviot joue avec un naturel qui pour une fois ne nous donne pas envie de claquer l’ado de service. Mention spéciale à Bruno Salomone dans la peau d’un agent sportif plein de vice et de ressort. Grâce à ce casting de castagne, on se projette aux côtés des personnages. Il faut préciser que l’écriture n’est pas bâclée. Les scénaristes ne nous ont pas infligé la sempiternelle bande de décérébrés jetés devant la caméra uniquement pour finir en viande hachée. Dans GOTD, l’exposition permet à la fois d’envoyer grave contre le milieu du foot et de s’attacher à certains personnages. Tout le monde y passe, joueurs, agents, journalistes, supporters, mais quelques-uns ont droit au repêchage. Si le film ne commençait pas par un flashforward horrifique on se croirait presque dans une comédie française à la « coup de tête ».

 

Film d’horreur oblige, l’action va se dérouler dans le trou du cul de la France. Capelongue est un village d’abrutis qui ont gardé de la rancune à l’égard de l’enfant du pays ayant fui dix-sept ans auparavant pour intégrer l’Olympique de Paris. Bienvenue donc à Ploucville, son stade, ses habitants haineux, ses supporters bas du plafond, son bar, sa cabine téléphonique. A partir de ce terreau fertile pour la culture des blaireaux, l’horreur va s’installer. Avec un respect des codes du genre. Nous ne sommes pas dans la parodie et c’est tant mieux, on vibre pour ceux qui en valent la peine. Le virus injecté par erreur sur l’un des joueurs de l’équipe locale contamine la population. Quelques rescapés tentent de survivre en se regroupant. L’occasion de révéler leur personnalité et parfois même leur véritable identité. Car sous les morsures et les coups d’extincteur, le scénario continue de se dérouler. Les têtes explosent, les secrets de famille tombent. Et les actes de boucherie alternent avec des gags mortels. A ce titre, je retiendrai particulièrement la scène où deux supporters arrachent la portière de voiture à laquelle ils sont menottés avant de s’en servir comme bouclier. Un zombie leur saute dessus et passe sa tête par la vitre que les deux zygotos s’empressent de remonter pour le décapiter. Fallait oser ! Mais ça fonctionne.

        

Les frères Rocher ont ouvert une voie en France. Espérons que certains s’y engouffreront avec autant de talent pour continuer à nous horrifier et à nous faire rire.

Ajouter un commentaire