GUNZIG Thomas 03
Première question : pourquoi Rocky, le film, qui donne le titre à ton livre ?
J’ai vu Rocky quand j’avais une dizaine d’années. Ça a été un choc. Je me sentais petit, faible et le monde me terrorisait. J’avais l’impression que c’était une fatalité. Et puis, les images de la détermination de Rocky à devenir un champion m’ont bouleversé. Elles étaient la démonstration qu’on peut changer son destin, qu’il existe au fond du coeur des humains une force incroyable qui peut vous conduire où bon vous semble. J’aimais l’idée de l’effort, de la douleur, passage obligé de la transformation. C’est quelque chose à laquelle je pense souvent dans le travail littéraire qui est souvent frustrant et toujours solitaire. C’est un travail qui demande une grande détermination et une lutte permanente contre les démons de la paresse et du découragement.
Qu'est-ce qui t'a donné l'envie d'écrire ce livre ?
C’est une question compliquée. À vrai dire, je n’ai jamais vraiment envie d’écrire un livre. Le fait est qu’au fil des années, je suis devenu écrivain. C’est ce que je fais. Je passe beaucoup de temps à attendre d’avoir une idée qui me plaise. C’est-à-dire une idée qui semble pouvoir devenir une bonne histoire. C’était le cas pour Rocky.
Tes personnages sont complètement désabusés et même dépressifs. Ils usent et abusent de Xanax. C'est aussi ton cas ?
Je crois que je suis pas mal désabusé… Souvent déprimé. Mais pas dépressif. Je ne prends rien. Je fais pas mal de sport. Ça maintient l’équilibre fragile de mon esprit.
Pour fuir la réalité, ils se perdent dans la fiction. Penses-tu que la fiction nous empêche de nous intéresser à la réalité ?
Je pense que la fiction est indispensable à la survie. Ce n’est jamais une fuite de la réalité. C’est un mode d’emploi. La fiction donne les coordonnées nécessaires pour ne pas se perdre dans la réalité.
Tes personnages ont pu s'isoler grâce à la richesse accumulé par le père. La richesse éloigne-t-elle de l'essentiel ?
Je ne sais pas. Je n’ai jamais été riche. Ce que je sais c’est que la pauvreté est un enfer qui occupe tout l’espace mental.
D'ailleurs c'est quoi l'essentiel pour toi ?
Être aimé par les gens que j’aime.
On dit que l'ennui amène, parfois, à la créativité. Tes personnages s'ennuient, mais ne sont pas vraiment créatifs. Tu es un homme fort occupé. T'arrive-t-il de t'ennuyer ?
Je ne suis pas si occupé que cela. Il y a de longues périodes durant lesquelles je ne fais pas grand-chose. Mais ce n’est pas de l’ennui. C’est de la « mise en disponibilité » de l’esprit. C’est dans ces moments que les idées arrivent.
C'est quoi finalement un être humain ?
Je suis un mauvais philosophe, je suis incapable de répondre à cette question.
A partir de la page 89 et seulement en quelques pages, tu nous dresses intelligemment l'histoire et la mentalité de l'Humanité. Au vu de ton roman, penses-tu que l'Humanité a encore une chance de s'en sortir ?
Non. Le cycle de souffrance et de destruction est éternel.
Tes projets ?
Je suis au bord de la rivière avec ma canne à pêche et j’attends qu’une belle idée vienne mordre à l’hameçon. Je ne sais pas du tout le temps que ça va prendre.
Interview coup de poing (vu Rocky...)
A quand remonte ton dernier coup de poing sur la table ?
Je n’ai jamais fait ça. Je déteste les gens qui font ça !
Pour sauver notre planète, faudrait-il une opération coup de poing ?
Probablement.
L'homme est-il pieds et poings liés face aux décisions qui ne sont pas prises ?
L’homme se berce de l’illusion de pouvoir prendre ou non des décisions. De toute manière, à la fin, il meurt.
Dors-tu toujours à poings fermés ?
J’ai un merveilleux sommeil !
Dernier coup de poing reçu ?
Je pratique des sports de combat. J’en prends très souvent. Hier encore...
Possèdes-tu une arme de poing ?
Un vieux nunchaku acheté durant mon adolescence.
Critique ici Thomas Gunzig : Rocky, dernier rivage, Au Diable Vauvert