Club des petites filles mortes (Le)
Gudule ou Anne Duguël a ceci de particulier qu’elle plonge immédiatement le lecteur dans une sorte de transe de laquelle il ne pourra sortir qu’une fois la dernière page tournée.
Elle a commencé à écrire très jeune et entre 1950 et 1965, elle écrit plus de 400 poèmes et une dizaine de romans. Sa première publication a lieu en 1987 avec Prince charmant poil aux dents. Depuis, elle alterne les livres pour la jeunesse sous le nom de Gudule et ceux pour les adultes sous le nom d’Anne Duguël. C’est en 1991 que paraît Le Corridor, son premier roman fantastique pour adultes. Suivront Asylum (1994), Le Chien qui rit (1995 – Prix Gérardmer), Entre Chien et louve (1998 – Prix Ozone), Petite chanson dans la pénombre (1996 – Prix Ozone) et Petit Théâtre de brouillard (1999) ou plus récemment, sa trilogie La Ménopause des fées. Pour la jeunesse elle a écrit presque 200 titres.
Le Club des Petites Filles mortes est le volume 1 de l’intégrale des romans fantastiques. Nous y retrouvons ses cinq romans parus dans la défunte collection Frayeur : Asylum, La Petite fille aux araignées (la petite Miquette est internée dans un asile après un drame atroce. Elle refuse de répondre aux sempiternelles questions de son psychiatre, et ne communique véritablement qu’avec son copain Gogol. Finalement, elle nous apprendra ce qui lui est arrivé, et pourquoi elle passe tout son temps à élever des araignées... Magnifique. L’auteur y est à son sommet), Gargouille, Lavinia et La Baby-sitter (Une maison isolée dans la campagne, une charmante baby-sitter et deux adorables bambins. La jeune fille conte des histoires, mais ce cadre idyllique va basculer dans l’horreur. Terrible et horrifique à merveille). Mais nous y retrouvons également Mon âme est une porcherie (Une ado mal dans sa peau, rejetée de tous, martyrisée par son entourage. Elle est laide, et elle le sait. Son amant le lui rappelle régulièrement, à ne vouloir la prendre que par derrière. De toute manière, elle ne l’aime pas. Elle n’aime qu’une seule chose : son cochon porte-bonheur. Une véritable plongée dans la folie. On n’y mâche pas ses mots. Une merveille, une fois de plus) et Petite chanson dans la pénombre (Petite fille à nouveau, mais morte cette fois. Son fantôme hante la vieille grange où repose son cadavre violé. Des touristes décident d’y passer un séjour, et lui offrent l’occasion de se venger. Texte très beau, touchant et cruel), Entre chien et louve (un homme se réincarne en chien, un très grand moment, déchirant et cruel) et Dancing Lolita. Tous parus entre 1995 et 1998.
Sauf Dancing Lolita qui est complètement inédit. Un vrai régal d’ailleurs. Grâce à un médicament, les personnes âgées peuvent redevenir des enfants, ce qui permet à certains d’assumer leurs pires fantasmes. On suit la fugue de Mina, une fillette qui a été violée par son beau-père, et la quête d’ Abel Féval, un journaliste qui recherche sa mère. Hypocrisie et perversion sont au rendez-vous.
Vous l’aurez compris, Gudule ne fait pas dans la dentelle. Ses textes sont denses et cinglants. Sa plume trempée dans l’acide vous écorchera jusqu’au plus profond de l’âme… Un recueil à lire absolument pour découvrir un fabuleux écrivain qui pèche ses thèmes au plus profond de l’enfance et de l’adolescence. Elle fait partie de ces auteurs qui réalisent une œuvre de qualité. Elle plonge son fantastique dans les racines de l’enfance avec ses peurs et ses angoisses. Elle nous invite à visiter les tréfonds de l’âme, à suivre les circonvolutions des psychoses en tout genre. Variant les textes « forts » et « poétiques », elle écrit une œuvre raffinée et magistrale.
Précipitez-vous sur ce premier recueil en attendant le deuxième qui se saurait tarder.
Gudule, Le Club des Petites Filles mortes, couverture : Christina Kennedy, 674 p, Bragelonne
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