Faim et la soif (La)
Paris, juin 2015. Dans un appartement aux allures de chapelle, une jeune femme s'est tailladé les veines. Avant de commettre l'irréparable, elle a cherché à s'arracher les yeux. Plus étrange encore, ces liasses de feuilles froissées sur lesquelles elle a griffonné le même nom : Nosferatu. Un mot roumain qui renvoie aux non morts, aux vampires et au Diable.
Ancien journaliste d'investigation, Raphaël Bertignac fait le lien avec la découverte dans un parking en construction, quelques mois plus tôt, du corps d'un jeune Roumain sans papiers. Vidé de son sang. À moitié dévoré. Les organes arrachés. Deux affaires en apparence distinctes. Et pourtant…
Cannibale, Diable, organes... des mots aux sonorités animales qui poussent Raphaël à mener l'enquête à Paris, à Prague et jusqu'au tréfonds de la Roumanie. Dans ces territoires interdits où il comprendra que sous les cendres de la révolution de 1989 et la chute de Ceaușescu, une menace est née. Intime. Cannibale. Sauvage. La faim et la soif.
Le récit commence fort, très fort… Nous qui aimons les thrillers, nous demandons souvent quel est le quotidien de ces hommes et ces femmes qui sont les incontournables des scènes de crimes, de morts suspectes ou inexpliquées, de ces décès souvent violents qui laissent des traces qu’il va falloir effacer. Raphaël est l’un de ces hommes, il nettoie les scènes après le passage de la police scientifique, des médecins et des familles. Mais les traces laissées dans ces lieux ne sont pas toutes de sang et de fluides, elles sont aussi faites de larmes, de questions, de doutes et de douleur. Lorsque le mystère prend le pas sur le détachement nécessaire à la fonction, les instincts d’un journaliste refond surface et l’enquête commence.
L’enquête de Raphaël va l’entraîner très loin. Loin de France dans des contrées de l’Europe de l’Est mais aussi loin dans l’horreur. Dans ce récit se mêlent, s’entremêlent, flirtent ensemble et s’épousent dans des noces sanglantes le réel , le surnaturel, la violence, le trafic de l’humain ramené à un simple objet de convoitise, la science… et l’Histoire.
Nous trouvons dans ce roman, une analyse glaçante de la Roumanie après la destitution du couple Ceaușescu. Nous pensions en 1989, en voyant les images d’extraits du procès puis de l’exécution du Conducător et de son épouse Elena, que le pays allait être libre. Enfin !
Or dans La faim et la soif, on découvre que certains anciens membres de la terrifiante Securitate ont vu leur police secrète décapitée, mais leurs plus vils instincts et leur soif de pouvoir sont restés intacts. Ceux-là ont continué à faire régner la terreur.
Ce roman a été pour moi une véritable révélation, j’avais découvert Mickael Koudero avec sa nouvelle dans le recueil Phobia que j’ai chroniqué récemment et j’avais beaucoup aimé son récit.
J’ai confirmation ici de mon intérêt pour cette plume très moderne. Mickael Koudero est scénariste et cela se ressent dans son écriture. Un style vif presque journalistique. Des phrases et des chapitres courts, allant à l’essentiel, nous emmenant dans un tourbillon d’informations passionnantes.
Mickael Koudero sait parfaitement doser suspense, peur, mystère et faits historiques… Finalement on tremble d’effroi lorsqu’on se sent menacé et la possible réalité de ce récit m’a offert quelques délicieuses sueurs foides.
Je tiens à remercier les éditions Hugo Thriller pour leur choix d'imprimeur : quel bonheur de lire un livre de cette qualité.
Interview de Mickael Koudero ici
La faim et la soif par Mickael Koudero, éditions Hugo Thriller, ISBN 9782755640663 prix 19,95 €