Écorce pâle
Une petite ville au cœur des Ardennes belges, avec ses non-dits et ses secrets. Le crime horrible d’un élève, Robert, sur un de ses camarades. Acharnement au couteau. Le gamin ne nie rien, tous les faits sont contre lui. Mais quelque chose dans son histoire gène Richard, le psychiatre qui l’a pris en charge. Il finit par demander l’aide d’une collègue et ancienne petite amie, Mary, pour essayer de creuser davantage le passé de Robert et l’explication de ce drame.
Avec Écorce pâle, Jonathan Laixhay ne se contente pas de nous offrir un thriller psychologique riche. Il n’y a dès le départ chez le lecteur aucun doute sur la culpabilité de Robert, cet adolescent bien plus mature que ne le laisse supposer son âge qui manipule à son gré les deux médecins à son chevet. Au-delà de ce « simple crime », si l’on peut dire, c’est l’exploration des trois personnages qui prime, leur présent et leur passé respectif. Richard est parasité par son passé, son affection pour Mary et son empathie pour Robert qui lui fait douter de son diagnostic. Mary cherche avant tout à prouver qu’elle est la meilleure, elle revient aussi sur les terres de son enfance, elle veut montrer que rien ne peut l’abattre et ses face-à-face avec Robert sont comme autant de parties d’échecs. Quant au jeune garçon, Robert, à travers son journal, on découvre un gamin mal dans sa peau, fruit d’une grossesse non désirée, abandonné physiquement par sa mère et psychologiquement par son père. Seule échappatoire dans son existence morne : la présence ténébreuse de la jeune Angie, une jeune fille gothique qui n’a pas froid aux yeux et l’emmène avec elle dans ses escapades nocturnes. Avec elle, Robert se crée peu à peu une identité qu’il se refusait d’arborer jusque-là. Cette écorce pâle finalement c’est sa couverture, un peu comme les chênes-liège dont on exploite l’écorce mais qui finalement la font repousser pour retrouver leur aspect primaire.
Une étude fouillée des personnages qui fait aussitôt penser à ces romans de François Mauriac où la petite bourgeoisie se malmène jusqu’au drame. En prime, l’auteur trouve le moyen de nous surprendre avec une fin à laquelle on ne s’attendait pas, en tout cas pas forcément de cette façon.
Le thriller psychologique est un genre compliqué, Jonathan Laixhay s’en tire de façon remarquable, parvenant à nous entraîner dans l’atmosphère poisseuse du récit. Un auteur qui n’a pas fini de nous bluffer.
Je remercie les éditions DesLivres et du Rêve pour leur confiance.
Jonathan Laixhay - Écorce pâle - Éditions DeslivresteduRêve - Avril 2024, 17 €