Caverne (La)
Avertissement
Les habitants de cette ville si semblable aux nôtres vivent dans deux dimensions. Le jour, ils mènent une vie ordinaire, mais sans cruauté ni agression ; la nuit, dans leurs rêves, ils entrent dans le monde de la Caverne, et chacun d’eux s’y transforme en animal – prédateur ou proie, fort ou faible… Peut-on laisser sortir le fauve humain de l’obscure caverne ? Et surtout le faut-il ?
Le monde de la Caverne est un monde fabuleux ! Un monde sans meurtre, sans violence, sans peur, un monde où point n’est besoin de fermer sa porte à clé le soir. Mais voilà… en s’endormant, nul ne sait s’il se réveillera le lendemain.
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Je n’aurai pas pu écrire un résumé à la fois si riche et si épuré, donc je me suis servie sans vergogne de l’avertissement qui introduit ce roman extraordinaire tant dans sa rareté de narration que dans l’esprit fantastique qui est sa source.
Un monde où le contrôle est le centre de l’histoire. Où le soviétisme est palpable avec la censure des artistes, le Trimagistère omnipotent, la traque de la différence…
Le roman se déroule en deux rythmes, un qui semble ralenti dans la Caverne même si c’est le lieu de plein d’horreurs et un plus rapide, dans la vie des deux héros, Pavla Nimrobets, une grande nunuche de 25 ans, et Raman Kovitch, un metteur en scène de théâtre. Elle est une daine dans la Caverne, lui un prédateur.
L’histoire culbute quand la daine s’échappe par trois fois et pire, quand proie et prédateur se reconnaissent dans la vie normale !
Et là, comme dans une scène de la mythique série « Le prisonnier », la manipulation et les faux semblants, le bon qui est méchant et le méchant qui fait du bien, toutes les bassesses, toutes les valeurs se révèlent, sans pitié.
Les question aussi se précipitent : a-t-on droit à être différent, à dénoncer le système quand il outre-passe les bornes, à se battre pour changer une société figée autour de son secret et son mutisme ? Où commencent et finissent bien public et respect de l’individu ?
Marina et Serguei Diatchenko nous offrent un roman original, plein de cet esprit slave qui fascine souvent (les auteurs sont Ukrainiens). Et même si parfois on a envie de secouer Palva tant elle nous apparaît comme une chiffe molle d’une naïveté exaspérante, on dévore ce roman en prenant à peine son souffle, pour ne pas effrayer la daine qui peut-être somnole en nous.
Très jolie couverture qui en dit ou trop ou pas assez (mais en tout cas m’a décidée à lire le livre très vite !).
La Caverne par Marina et Serguei Diatchenko, traduit par Antonia Roubichou-Stretz, illustré par Nancy Brown, Albin Michel