Figurec

Pourquoi entrons-nous toujours dans les restaurants bondés de monde ? Pourquoi un resto vide ne nous attire pas ? Pourquoi privilégierez-vous un produit dont on vous a dit du bien plutôt qu’un produit inconnu ? Pourquoi ne pas faire votre propre expérience ? Tout simplement, parce que la masse attire la masse. Ce schéma, les grandes enseignes en ont pris conscience depuis fort longtemps ! Si longtemps, qu’au 19ème siècle, un certain Roquebrun lance un nouveau concept : la location de figurants. Par exemple, un épicier lance son commerce. Pendant un mois, il loue des figurants qui entrent et sortent de son magasin afin d’attirer la foule.

L’idée a fait du chemin depuis. Vous pouvez louer des amis pour un anniversaire, une famille pour un mariage, des pleureuses pour un enterrement. C’est devenu un vaste business uniquement motivé par l’argent et employant des dizaines de milliers de figurants à travers le monde. L’ennui, c’est qu’une fois entré dans l’engrenage de FIGUREC, c’est comme une drogue, vous devenez dépendant.

Nous avions connu « The Game » ou « Le Truman Show » au cinéma. « Figurec » en est le fidèle héritier et ajoute une « french touch » pas désagréable. Moins dans le sensationnel, plus dans le ressenti, l’histoire nous entraîne dans une vaste tricherie à l’échelle internationale. Nous nous savions manipulés par les médias, la publicité, les politiques, mais jusqu’à imaginer que tous ces gens louaient des figurants pour influencer nos décisions ! L’histoire va plus loin, puisque cette location de fausse vie est accessible à tous, moyennant de fortes sommes. Le fait que le narrateur nous reste inconnu nous le rend plus proche. Ces habitudes résonnent avec les nôtres. Limite, nous pourrions croire qu’il s’agit de notre vie.

Poussant à la réflexion, à l’inquiétude aussi, reflet d’une société qui préfère se voiler la face, le récit de Fabrice Caro est donc une bonne surprise de l’année 2006. La bd de Christian de Metter ajoute un plus, à la fois dans la construction des phylactères où dialogues et pensées s’entremêlent de façon originale, et dans les textures qui rappellent l’expressionnisme des portraitistes parisiens. Bonne lecture et ne soyez sûrs de rien !

Titre : Figurec

Scénario, dessins et couleurs : DE METTER Christian

Editeur : Casterman

Parution : février 2007

Nombre de pages : 72