Mireille Darc, une femme libre

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Avec cette autobiographie, voilà un bel hommage à une comédienne qui mérite qu’on s’intéresse à sa carrière. J’avais aimé son livre précédent « Tant que battra mon cœur » dans lequel elle parlait des hommes de sa vie et de ses problèmes de santé. Ce nouveau livre fait la part belle à l’image autant qu’au texte. Richard Melloul, un ami de toujours de la comédienne, nous dévoile Mireille Darc à travers plus de 200 photos qui ne sont pas toujours connues des médias. On a droit à une autobiographie à jour ainsi qu’à un bel album photo.

Mireille Darc n’est pas une actrice conventionnelle. Elle n’a pas eu un parcours linéaire comme beaucoup d’autres. Au contraire, sa vie a été parsemée d’événements marquants et parfois tristes, qui ont bouleversé sa carrière. Elle y a aussi rencontré l’amour à travers trois hommes, dont le plus célèbre est Alain Delon qui a partagé sa vie pendant quinze ans.

L’image que j’ai toujours eue de Mireille Darc, c’est celle d’une belle blonde à la tête bien remplie, et d’une grande simplicité. Sans jouer dans la catégorie des Brigitte Bardot, Catherine Deneuve, Simone Signoret, Romy Schneider ou Michèle Mercier de l’époque, Mireille Darc est parvenue à imposer un style de femme plus libérée, plus moderne, plus positive, mais aussi plus proche des gens. Ce n’est pas une icône du septième Art qu’on admire pour ce qu’elle montre d’elle, mais elle a marqué les gens par ses qualités et sa simplicité qui sont restées constantes tout au long de sa carrière. Bien sûr il y a des moments où l’image a pris le pas sur ce qu’elle est. C’est par exemple le cas pour « Le grand blond à la chaussure noire » où Mireille Darc porte une robe décolletée dans le dos tellement profonde qu’on ne peut s’empêcher d’écarquiller les yeux de plaisir. Avec le recul du temps, on ne sait plus ce que Pierre Richard faisait dans ce film. Seule l’image de Mireille Darc hante encore nos souvenirs. Mais quel beau souvenir !

 

Mais qui est vraiment Mireille Darc, née Mireille Aigroz à Toulon en 1938 ? C’est une actrice et réalisatrice dont le nom de scène (en hommage à Jeanne D’Arc) est devenu son vrai nom. Après une enfance en demi-teinte, avec des parents qui lui montrent peu de tendresse, elle monte à Paris en 1959 pour devenir comédienne. Elle ne se sent pas particulièrement jolie et veut devenir blonde. Avec 300 francs en poche, elle arrive à Paris et rêve d’entrer à la Comédie Française.

Une amie d’enfance qui lui fait défaut et un journaliste qui dirige un grand magazine vont donner un coup de pouce à sa carrière. Elle est sélectionnée pour jouer un petit rôle de soubrette dans une pièce de théâtre. Puis ce sont ses premiers pas au cinéma. Rien d’extraordinaire, jusqu’à ce qu’elle tourne dans « Pouic-Pouic » de Jean Girault, où elle est entourée de Louis de Funès et Jacqueline Maillan. C’est à ce moment-là qu’elle est repérée par George Lautner qui en fera son égérie pendant treize films. Elle fera partie de la bande à Lautner, qui comprend Francis Blanche, Lino Ventura, Bernard Blier et Michel Audiard. Une bande de copains misogynes dans laquelle Mireille Darc s’épanouit. Plus tard, elle donnera la réplique à Jean Gabin dans « Monsieur », puis portera sur ses épaules le film « Galia » où elle tiendra le premier rôle. Ce sera une étape importante dans sa carrière. Un point d’orgue comme elle s’amuse à le dire, car elle devient une star à part entière.

On lui offre l’occasion de continuer sa carrière aux États-Unis. Au dernier moment elle se ravise et n’y va pas. Elle tournera « Week-end » de Jean-Luc Godard. Elle rencontre Alain Delon (qu’elle avait précédemment vu en compagnie de Romy Schneider). C’est l’époque où il est marié à Nathalie. Il est en train de tourner « La piscine ».
Mireille Darc ne va pas lui faciliter la tâche, car à cette époque c’est déjà un monstre sacré et elle ne tient pas à bruler ses ailes si près du soleil. Pendant quinze ans les deux acteurs formeront un couple parfait. Elle lui proposera de mettre sa carrière en veilleuse et de se consacrer entièrement à lui. Mais ce n’est pas ce qu’Alain Delon veut. Il tient à ce qu’elle continue sa propre carrière tout en l’aimant. C’est beau, c’est raconté à travers les souvenirs de Mireille Darc. Page après page, on découvre une femme attachante et sensible. Belle à toutes les époques. Des ennuis de santé vont interrompre la carrière de l’actrice. Un cœur fragile dès l’enfance va la forcer à passer deux fois sur le billard pour se faire opérer du cœur, et cela à trente ans d’écart. Entre les deux un accident de voiture va la mettre en danger. Elle aura la colonne vertébrale fracturée.

Après Alain Delon, elle retrouvera l’amour aux côtés de Pierre Barrett. C’est l’époque où elle tourne « La barbare » en tant que réalisatrice. Le film est adapté d’un roman de Katherine Pancol. On est en 1988, et Mirelle Darc à 50 ans va perdre l’homme de sa vie. Il décèdera à l’hôpital. Un troisième homme fera son apparition dans sa vie sentimentale et deviendra son mari. Il s’agit de Pascal Desprez.
Mireille Darc se tourne alors vers la télévision et on la retrouve dans les sagas « Les cœurs brulés », « Les yeux d’Hélène », « Terre indigo ». Puis dans « Frank Riva » en compagnie d’Alain Delon. En 2007 elle monte sur les planches dans la pièce « Sur la route de Madison » toujours en compagnie d’Alain Delon.

Mireille Darc c’est aussi une réalisatrice. On lui doit une douzaine de documentaires pour France télévision (Envoyé spécial, Des racines et des ailes), dans lesquels elle rompt certains tabous. Elle est aussi à l’aise derrière la caméra que devant.

Sans connaitre ses projets (cinématographiques), j’espère que Mireille Darc continuera à apparaitre dans des films. On parle de l’adaptation du livre de Francis Dannemark « Histoire d’Alice qui ne pensait à rien (et de tous ses maris plus un) ». Un rôle qui irait à merveille à l’actrice, car malgré tous les revers de la vie, elle montre une impression de plénitude, de sérénité qu’une grande dame de son âge donne au public. Et si ce personnage n’a pas eu le même parcours que celui de Mireille Darc, il en a beaucoup de points communs.

Le hasard a fait qu’en lisant cette autobiographie, je suis tombé sur l’émission « un jour un destin », dans laquelle elle était présente à la fin et répondait aux questions de Laurent Delahousse. Et j’y ai découvert une Mireille Darc sensible, attachante, très touchante, comme celle qu’elle révèle dans ce livre qui lui est consacré.

À n’en pas douter, un livre-vérité, une autobiographie agrémentée de plusieurs centaines de photos pas toujours connues du grand public. Un très beau livre qui fera passer un bon moment de lecture. Mireille Darc, c’est une grande dame, une comédienne au grand cœur (qui lui a parfois fait défaut), mais qui restera dans celui de ceux qui l’ont suivie tout au long de sa carrière. Un beau moment de lecture.

Mireille Darc, une femme libre, Mirelle Darc & Richard Melloul, Flammarion, 2013, 288 pages.

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