Cavalier du septième Jour (Le)
A Pueblo Quito, une localité frontalière du sud des États-Unis, une communauté défavorisée survit grâce aux retombées du commerce de la drogue. C'est également là qu'ont échoué nombre d'individus au passé tragique. A Pueblo Quito, tout le monde a quelque chose à cacher : crimes, trahisons, rêves absurdes, fantasmes sulfureux… Tout le monde a l'habitude de regarder anxieusement par-dessus son épaule pour vérifier que personne ne l'a pris en filature. Dans ce creuset en ébullition s'agite une population hantée par des peurs irrationnelles, notamment la légende du Cavalier du Septième Jour, personnage mythique qui, chevauchant à la tête d'une horde de mustangs déchaînés, viendra un jour punir les pécheurs en les piétinant jusqu'au dernier. Une légende ? Vraiment ?
Depuis un certain temps, j’enchaîne les lectures qui me cassent les noisettes. Si. Je vous le jure. Je démarre, je grignote les trente premières pages et là, j’ai les yeux qui roulent. Parce que les mêmes flics au passé trouble, les mêmes serial-killers obsédés par les puzzles et les mêmes villes rongées par les souvenirs d’un traumatisme ancien s’enchaînent sans trop d’originalité. J’vais être un peu dur, mais on a parfois davantage l’impression de lire une note d’intention pour une série formatée façon TF1/France 2/France 3 plutôt qu’un roman. Tout cela manque de couleurs, d’originalité, de transgression et de plaisir qui tache. Tout cela est finalement bien sage et bien gentil.
Et puis, on coin de mon bureau déboule un « petit » inédit de Serge Brussolo, au format poche rien que ça, et en deux jours, l’affaire est pliée. Ça bouge, ça vous balance des personnages bien barrés, ça vous attire dans un sens, avant de vous surprendre d’une bonne scène d’action et de vous retourner le récit comme un gant.
Le cavalier du Septième jour est un plaisir de tous les instants. Une cavalcade de chapitres qui ne laisse aucun répit et qui ose le mélange de genres sans jamais respecter le moindre cahier des charges. Toute la force de Brussolo s’exprime aussi dans la création de personnages au caractère complexe, mais pas compliqué, aux réactions humaines et réalistes.
« Mais alors », vous entends-je hurler depuis le premier balcon, « pourquoi Serge Brussolo n’est-il pas au sommet des listes de vente, de Lille à Marseille, de Arlon à Bruxelles et aux quatre coins de la francophonie ? » Bah, c’est simple. Parce que le bougre de sauvage n’entre dans aucune case. J’imagine déjà d’ici les petits génies du marketing des « grandes maisons » de la littérature en train d’essayer de faire entrer ce Cavalier dans les petites cases d’une feuille Excel pleine de prévisions et de cibles démographiques. Va y avoir du gratouillis de cuir chevelu et de la surchauffe de cervelle, c’est moi qui vous l’dis.
Qui plus est, malgré son évidente connaissance du mauvais genre et de ses plus évidentes ficelles, Serge Brussolo refuse les archétypes avec une joyeuse constance. Ainsi, dans Le cavalier du Septième Jour, vous ne trouverez pas de héros, pas de cause, pas d’arc narratif prédigéré et encore moins de rédemption lénifiante.
Si vous embarquez au cœur de l’univers de Brussolo, vous allez prendre votre pied. Et vous ressortirez de cette expérience avec sur la langue le goût du sang, de la cendre et de la sueur. Et putain, en ces temps aseptisés, ça fait un bien fou !
Serge Brussolo, Le cavalier du Septième Jour, H&O Éditions