Bifrost n°59
J.G.Ballard
Décidé il y a deux ans, ce numéro spécial Ballard est devenu un hommage posthume. Rappelons en effet que l’auteur de La Forêt de cristal est décédé le 19 avril 2009. Mais, comme il se doit, la revue commence par quelques nouvelles, la première due carrément au Maître honoré, Autobiographie secrète de J.G. Ballard, texte court et brillant, dans lequel il se déclare enfin « prêt à s’atteler à sa véritable tâche » au milieu d’un monde totalement vidé de ses habitants... Suivent quatre récits ’ballardiens’ écrits par des auteurs qui n’ont jamais caché leur admiration pour Ballard. Le jeune Jacques Mucchelli tout d’abord, avec Vermilion Dust, au titre explicite, assez violent. Perspectives de fuite de Jean-Claude Dunyach commence et se conclut par un orgasme et décrit une relation affective complexe mâtinée d’expériences scientifiques hallucinantes. Tropique d’étoiles, de Jacques Barbéri, mêle érotisme (à nouveau) et politique dans un style remarquable, nouvelle cyclique relatant les affres d’un astronaute sur le déclin victime d’une expérience incompréhensible. Pour clore cette belle série, qui mieux que le vétéran Jean-Pierre Andrevon : avec La Mémoire des jours noyés, il esquisse en traits rapides la poursuite échevelée d’un voyageur temporel à la recherche de l’enfant... J.G. Ballard. Texte remarquable à la fin désenchantée. Après ces quatre fictions, et les inévitables critiques (qui évitent cette fois toute polémique, contrairement à celles du n° 58), suit une petite recension sur la revue « Le Rocambole », bulletin de l’Association des Amis du Roman Populaire. Un must pour les amoureux de vieilleries. Où l’on parle de cabinets de lectures dans les années 1830, et des romans de Paul de Kock. Pour les amateurs, voir www.lerocambole.com.
Enfin Ballard vient. Le dossier est entamé, après l’introduction de Richard Comballot, par un interview réalisé par Philippe Hupp en 1973, en pleine époque New Wave, juste après Crash ! et Vermilion Sands. Un arrêt sur l’image temporel. Louis-Vincent Thomas décrypte ensuite savamment l’image de la Mort dans l’oeuvre de Ballard. D’autres entretiens et essais suivent encore, tous éclairant la personnalité complexe et fascinante de l’écrivain anglais qui paraît bien moins pessimiste que l’on pourrait croire. Je citerai les pages de Dunyach encore, sur l’espace et le temps ou le souvenirs de Maxime Jakubowski. Enfin, l’indispensable guide de lecture des principaux ouvrages et une bibliographie fouillée terminent ce numéro exceptionnel. Ballard fut un homme au ’regard extrêmemement lucide porté sur le monde contemporain’ comme l’écrit Olivier Noël dans le guide à propos de Millénaire mode d’emploi, un de ses livres les plus passionnants. Rien n’est plus vrai et ce numéro sera thésaurisé précieusement.