Entre les ombres
Tout commence par une partie de pèche en solitaire. Pas moyen de trouver du monde lorsque l’on est le dernier homme sur Terre. Autour de vous, tout n’est qu’immeubles en ruines, bateaux à l’agonie et lianes envahissantes. Une balade dans le supermarché, vos souvenirs de vos huit ans au pied du sapin vous submergent. Un piano dans un magasin abandonné, vous vous revoyez jouer pendant que l’être aimé chante auprès de vous. La cour de l’école. Un couloir. Un bar. Votre rencontre avec votre femme. Chaque jour, vos souvenirs deviennent vos uniques compagnons jusqu’à devenir flous et disparaître. Ce qui les remplace ? Un monde sauvage, sans pitié où seul la carapace d’un char vous protège d’une horde de crabes gigantesques, où un parapluie ne suffit plus contre des grêlons devenus assassins. La guerre reste un souvenir tenace. La haine des hommes face aux hommes. Les lianes continuent de tout envahir. Commence la longue solitude de la métamorphose.
Nul besoin de tout dire, de tout montrer, juste suggérer.
Grâce à une belle poésie et un dessin d’une incroyable tendresse, Arnaud Boutle nous promène dans le quotidien d’un homme face à sa solitude. Et quelle solitude ! L’auteur trouve les gestes justes, sa juxtaposition souvenirs et réalité sonne correctement – un vrai chef d’orchestre. Il n’abuse pas d’effets de scène façon Hollywood. A la place, il laisse parler notre imaginaire, nos émotions. Il parvient même à faire de la ville un être vivant. Inutile de faire surgir des zombies quelque part. Il se permet une attaque de crabes géants, c’est vrai, mais pour nourrir un discours, parce que c’est un matériau vivant de ce futur apocalyptique. Idem pour les lianes géantes. Elles sont le prolongement des immeubles, elles sont des artères, des veines rappelant à l’Homme qu’il n’a plus sa place ici. Peut-être ailleurs ?
A vous de le découvrir.
Titre : Entre les ombres
Scénario et dessins : BOUTLE Arnaud
Editeur : Glénat
Nbre de pages : 72
Parution : septembre 2010