Servitude, Le chant d'Anoroer T1

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Kiriel, maître d’arme du roi Garantiel d’Anorœr doit épouser la princesse Lérine et être ainsi admis au sein de la noblesse, malgré le fait qu’il ne soit pas d’ascendance géante. Bien évidemment, cette mésalliance ne plaît pas à tout le monde, mais c’est pourtant de l’extérieur que viendra le coup qui abattra sa maison d’adoption. Le clan Veriel, las de la domination des descendants d’Anorœr et se réclamant d’un glorieux passé qui le vit régner sans partage, fomentera une révolte en s’assurant du soutien des mystérieux chevaliers Drekkars, guerriers d’élite dont on devine une certaine parenté avec les Dragons, ennemis jurés des géants dont ils ont causé la disparition.
Servitude s’annonce comme un cycle en cinq tomes qui, s’ils tiennent tous les promesses du premier livre, en feront certainement un monument de la bande dessinée. Le chant d’Anorœr est en effet, tant sur le plan graphique que scénaristique, une énorme claque qui vient surprendre le lecteur.


Graphiquement, on retrouve une parenté certaine avec un précédent one-shot commis par les deux compères, Eric Bourgier, dessinateur et coloriste et Fabrice David, scénariste, savoir Live War Heroes, lui aussi publié aux éditions Soleil. Le chant d’Anorœr reprend en effet la technique du monochrome utilisée dans Live War Heroes pour les flash-back, surprenante de puissance graphique et souvent plus apte que le pur noir et blanc à permettre un foisonnement de détails combiné avec une grande facilité de lecture lorsque cette technique est bien employée. Ces dégradés de noir, gris, sépia et beige permettent en effet de jouer sur des effets de lumière, des ombrés et nuances plus subtils que la technique du noir et blanc, tout en en conservant l’effet brut de décoffrage qui donne aux planches originales leur puissance évocatrice. Du très grand art.

Quant au scénario, le lecteur se retrouve entraîné dans un vrai monde imaginaire, qui semble vraiment vivre autour des héros et dont la profondeur, les détails et la maturité surprennent à chaque relecture. L’on est très loin des mondes foisonnant de détails d’Arleston, qui laissent toujours un sentiment d’inachevé car aucune vue d’ensemble ne s’en dégage. En réalité, ce point n’est pas si étonnant lorsque l’on sait que les deux complices peaufinent leur monde depuis plus de dix années, réalisant descriptions, maquettes, sculptures, schémas et jeux avec le concours de leurs amis. De ce terreau fertile, un univers est né, presque trop riche pour une bande dessinée, et l’on se surprend à espérer que les auteurs nous gratifieront d’un ou plusieurs carnets pleins de croquis ou d’ébauches, tant ce seul tome donne envie d’en savoir plus et les planches – pourtant magnifiques – peinent à le contenir. L’on se surprend également, lorsque l’on en est adepte, à espérer qu’un jour, ces deux auteurs accepteront de prêter leur concours à la rédaction d’un jeu de rôles…
Tout concourt donc à faire de cette bande dessinée une petite merveille, qu’apprécieront tant le collectionneur enragé – qui pestera devant l’absence quasi-complète de produits dérivés, dont une remarquable absence de tirage de tête en ces temps où le moindre album même banal se voit doté d’un tirage spécial – que le simple amateur. Tous resteront en arrêt devant cette porte entr’ouverte sur un monde riche, captivant et cohérent, souhaitant en apprendre plus et attendant la suite avec une impatience fébrile.

Sur ce point, un signe ne trompe pas : la première édition s’est vendue tellement rapidement que la plupart des librairies spécialisées ont dû conseiller à leurs clients collectionneurs de se rabattre sur les grandes surfaces pour espérer en acquérir un exemplaire… Bravo aux sélectionneurs des éditions Soleil, qui ont découvert un vrai bijou, à acquérir d’urgence !

Titre : Servitude tome 1, Le chant d’Anorœr

Scénariste : Fabrice DAVID

Dessin et couleur : Eric BOURGIER

Éditeur : Soleil

Parution : 26 avril 2006

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