Asylum

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Cent cinquante ans les séparent, mais elles vivent le même cauchemar...

Violoniste à l’aube d’une belle carrière, Emilie souffre de troubles bipolaires. Après une tentative de suicide, elle est hospitalisée, puis internée dans un service psychiatrique. En dépit de ses protestations, la voici traitée comme une criminelle, gavée de médicaments, privée des libertés les plus élémentaires, coupée du monde. Et de surcroît, en butte au harcèlement du sinistre docteur Sharp. Pour ne pas basculer dans la folie, elle entreprend de consigner le quotidien de sa détention. Et découvre dans son petit carnet noir le message de détresse d’une jeune femme séquestrée dans un asile de fous de l’Angleterre victorienne. Une Emily qui lui ressemble en tous points. Une porte sur un autre monde s’est ouverte, un monde étrange où fleurissent les idylles entre détenues, où les spectres bruissent sous le papier peint, où des rats de haute éducation s’expriment dans une langue des plus châtiée. Réalité, ou divagations ?

 

Asylum s’inspire de l’expérience personnelle de l’auteure, Emilie Autumn, qui s’est retrouvée internée en hôpital psychiatrique pendant une semaine pour une tentative de suicide. Elle a été diagnostiquée bipolaire et suite à cette expérience, elle s’est lancée dans l’écriture d’Asylum.

Dans ce roman, on va donc suivre le personnage d’Emilie, bipolaire qui vient de tenter de se suicider. De ce fait, elle se retrouve internée de force dans un hôpital psychiatrique... Un jour elle découvrira dans ces affaires, un extrait de L’Asile pour jeunes filles rebelles, un journal intime écrit par une autre Emily, il y a bien des années...

J’ai beaucoup aimé l’alternance des points de vue entre les histoires des deux personnages bien qu’on suive principalement le récit d’Emily. Cette dernière vivait avec ses parents et ses sœurs cadettes dans la pauvreté. Emily, entre toutes ses occupations domestiques, avait une passion, le violon, et elle jouait dès que possible pour elle, ses proches et de temps en temps, dans un bar où elle fut repérée par un homme étrange et élégant tenant un conservatoire. Ce dernier acheta Emily pour lui enseigner pleinement la musique. Une fois l’art délicat du violon maîtrisé parfaitement, on l’envoya commencer sa carrière de musicienne dans la demeure du comte de Bainbridge. Emily va rapidement réaliser qu’elle est esclave de la propriété et que le comte désire bien plus que son talent... Elle essaiera de fuir pour sauver sa vie mais se retrouvera internée de force à l’Asile pour jeunes filles rebelles. Son calvaire ne fait alors que commencer...

Les deux personnages sont aux antipodes l’une de l’autre. L’Emilie du présent est sanguine avec un petit côté rebelle. Elle est impulsive et nerveuse, ne supporte pas de se retrouver internée : on sent clairement un sentiment de malaise émaner d’elle. On ne sait presque rien de son histoire qui reste très mystérieuse et floue. Au fil des pages, ce personnage s’efface pour laisser le premier rôle à Emily. Cette dernière est aimante et volontaire. Quand elle doit quitter sa famille, elle ne tient pas rigueur à ses parents et accepte pleinement sa nouvelle vie. Elle est déterminée à donner le meilleur d’elle-même pour faire de sa passion, son métier. Malgré les horreurs qu’elle va endurer, elle reste bienveillante envers ses proches. 

Ce roman est une véritable descente aux enfers pour Emily qui subit horreur sur horreur. Quant à l’autre Emilie, elle sombre peu à peu dans la folie et ne trouve de réconfort que dans les écrits d’Emily. Mais qu’arrivera-t-il le jour où il n’y aura plus rien à lire ? 

J’ai beaucoup aimé le style de l’auteure, fluide et authentique. La plume est à la fois délicate et brute, douce et violente. C’est également un récit très rythmé. Entre le changement de points de vue, le fait que les chapitres soient courts (certains font seulement quelques lignes) et l’incorporation au roman de documents comme des paroles de chansons, des formulaires, des notes et des rapports, les pages s’enchaînent avec fluidité. C’est un récit qui m’a littéralement obsédée et retournée... Le sujet est original et osé puisque rares sont les romans qui abordent le sujet de l’hôpital psychiatrique. L’intrigue, quant à elle, est bien menée et entraînante. 

Asylum possède une ambiance à la Burton : une atmosphère sombre et dérangeante avec une pointe d’Alice au pays des merveilles. C’est un véritable huis clos qui retourne l’estomac et serre le cœur. Ce n’est pas un roman à mettre entre toutes les mains puisqu’il est particulièrement violent émotionnellement et risque de choquer les âmes les plus sensibles. Entre l’ambiance pesante et désagréable, accentuée par les lieux sombres, humides où règne la saleté, et les violences endurées, c’est un récit très intense qui est présenté ici. Cette lecture m’a clairement mise mal à l’aise et a fait naître du dégoût en moi. Je suis passée par l’incompréhension, par la colère, le rejet, la tristesse... C’est un véritable ascenseur émotionnel.

 

Nous sommes des corps. Des bouts de corps numérotés. Rien de plus.

 

Ce roman met en avant des sujets importants comme la maladie, la santé et la folie mais évoque principalement les traitements inhumains que pouvaient subir les patients d’asiles psychiatriques et plus particulièrement les femmes qui, à l’époque d’Emily, étaient considérées comme moins que rien. Entre violences gratuites, abus sexuels, expérimentations de traitements et maltraitance, il y a de quoi se révolter. 

Asylum est un roman dont on ne ressort pas indemne... Si vous avez envie d’un roman qui vous sort de votre zone de confort et qui vous pousse dans vos retranchements, alors procurez-vous ce livre époustouflant. 

Ce livre, c’est tout simplement une claque ! 

 

Asylum, par Jennifer Emilie Autumn, traduit par Arthur Desinge, Editions Hugo Roman dans la collection Nouveaux Mondes

 

Article en collaboration avec le blog Les Livres Enchantés

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