36ème Convention nationale française de Science-Fiction
Bellaing 20-23.08.2009.
Evénement annuel et considérable pour les fans francophones de SF, la Convention nationale se tenait cette année, comme en 2006, à Bellaing, commune rurale proche de Valenciennes, dans le département du Nord. Rédacteur en chef de la revue ’Galaxies’ et éditeur du fanzine ’Géante rouge’, Pierre Gévart en assurait l’organisation. J’ai assisté aux journées des vendredi et samedi, en compagnie de 80 autres fans enthousiastes : beaucoup d’habitués, mais pas mal de nouveaux. Jeudi avait lieu une conférence assez originale consacrée à la SF arabe, donnée par Kawthar Ayed, universitaire tunisienne. Je regrette amèrement mon absence car le débat devait être tout à fait passionnant. Du coup, je vous promets une interview de l’intervenante résumant sa participation, que je publierai dès réception.
Arrivé vendredi à midi, après l’excellent déjeuner-buffet, je partis avec tous les partipants en bus vers le site terraformé de Rieulay. Chaque convention met en effet son point d’honneur à mettre sur pied une visite d’un lieu intéressant dans sa région. En 2006, nous avions parcouru une mine désaffectée. Cette fois-ci, il s’agissait d’un terril aménagé en parc de loisirs, le ’Parc des Argales’. Fort impressionnant, il faut l’avouer. Ou comment l’on peut aménager le paysage désolé d’un ancien terril en lieu de récréation agréable pour divertissement familial. Retour à la salle de la bibliothèque municipale de Bellaing, où avait lieu la Convention. Ensuite, nous avons, en guise d’apéritif, eu droit à un long interview en plein air de la première star de la Convention, l’écrivain français bien connu Kurt Steiener, alias André Ruellan. L’auteur de La saga d’Ortog, de Tunnel, Mémo ou du Disque rayé portait fièrement ses 87 ans. Il y avait quelque chose d’irréel à écouter ce vieux Monsieur de la SF égrener quelques souvenirs mais surtout parler de l’évolution actuelle du genre sur la terrasse d’un café, devant un parterre d’auditeurs attentifs, et sous les effluves odorantes du barbecue géant qui se préparait... Après ledit barbecue, dégusté en excellente compagnie, je rentrai, le fond de l’air devenant frais. Le lendemain samedi, Pierre Gévart avait pensé à nous régaler de croissants et de café : nous étions donc prêts, à 9 heures, pour écouter la conférence de la deuxième star du weekend, l’incontournable auteur belge et pionnier du fandom, j’ai nommé Alain le Bussy. Après une rapide autobiographie, il nous a entretenu de l’écriture. Fort de sa longue expérience (il a écrit une centaine de romans et plus de nouvelles encore), « l’homme qui écrit plus vite que son ombre » a décrit les mécanismes de la construction d’un récit, et surtout insisté sur son attrait pour la simple récitation d’une histoire, sans ’message’ particulier. Son plus grand plaisir, nous a-t-il confié, est de s’entendre dire par un lecteur que celui-ci n’a pu s’endormir avant de terminer son roman... Anectode amusante : après sa conférence, le Bussy posa la demande fatidique : « Y a-t-il des questions ? ». C’est alors que Jean-Jacques Regnier accourut, s’empara du micro et d’une voix retentissante s’exclama : « Bon. Et alors ? ».Nullement désemparé par un public hilare, Alain répondit, sobrement : « Je continue ».
Suivait alors un entretien avec la troisième et dernière star : Elisabeth Vonarburg. Vedette absolue de la Science-Fiction québecoise, l’auteure du Cycle de Tyrannaël et des Chroniques du Pays des Mères, était présentée par Irène Langlet, Maître de conférences à l’université de Rennes-2 et auteure elle-même d’un magistral manuel sur la SF (La Science-Fiction, lecture et poétique d’un genre littéraire, paru chez Armand Colin en 2006). Présentation, introduite par un ’rapport’ magistral sur les relations entre la SF et le milieu universitaire, et les difficultés toujours actuelles de l’acceptation du genre. Elisabeth Vonarburg, quant à elle, a enchaîné sur le même sujet, mais au Québec, puis s’est concentrée, comme Alain le Bussy une heure auparavant, sur la description du mécanisme de l’écriture, avec d’abondants exemples puisés dans ses propres oeuvres. Une large part de l’entretien se déroula ensuite sur la problématique de l’approche de la SF, de la réception par un ’néophyte’, des livres à conseiller, à qui, quand et comment. Enfin, nos deux dames concluèrent sur la place de la SF littéraire de nos jours, en notant son recul par rapport à la fantasy ou à l’illustration de la SF par le biais d’autres médias comme la publicité, les jeux ou le cinéma. Entretien de haut vol donc, très particulièrement apprécié des participants, au grand complet pour ce moment d’exception.
Dernier événement de la Convention, après l’assemblée générale de l’association Infini : une table ronde entre l’organisateur Pierre Gévart et le public sur l’état de la SF en 2009, qui se termina par la même conclusion un peu désabusée : la SF purement littéraire intéresse bien moins de monde qu’il y a quelques décennies...
Après cela eut lieu la proclamation des prix Rosny Aîné et Versins. Le premier fut gagné par Xavier Mauméjean dans la catégorie romans pour Lilliputia (Calmann-Lévy) et par Jeanne-A Debats pour La vieille Anglaise et le continent (Griffe d’encre) dans la catégorie nouvelles. Quant au second, couronnant le plus mauvais jeu de mots du weekend, il alla à celui-ci : « Tous se reproduisaient, mais Georges clonait », dû à Bernard Dardinier.
J’oubliais de vous dire, mais tous ceux qui fréquentent les Conventions le savent, que la salle centrale était bien entendu occupée par des stands de livres, neufs ou (surtout) d’occasion, ou d’illustrations. A noter le stand des Editions Eons ou celui de l’écrivain Philippe Halvick, présent en personne. Ambiance sympa et ludique, comme toujours : les habités se resaluent avec joyeuseté et accueillent les nouveaux venus avec enthousiasme. Samedi soir enfin, les deux événements traditionnels : d’abord le grand banquet, fort délicieux ma foi, et très ’extraterrestre’. Nous eûmes en effet droit, dès le cocktail d’apéritif, à des mets bizarres, jugez-en : Cocktail de Vénus, Verrine du Soleil rouge, Ballotin d’agneau des sables de Pluton, et Météorites des Trois Planètes. Bravo et merci au traiteur inventif ! Puis vint la terrible vente aux enchères animée par l’humour déjanté de Georges Pierru.
L’année prochaine, nous nous retrouverons à Grenoble, et en 2011, nous avons voté à l’unanimité pour Esneux, la commune liégeoise d’un certain... Alain le Bussy ! Quant à 2012, la Convention n’aura peut-être pas lieu en Europe mais... chut !